Öland : 5 erreurs que 90% des visiteurs commettent

Öland, cette longue et fine langue de terre suédoise de 1 342 km² posée sur la Baltique, est un monde à part. Avec ses 25 000 habitants, ses moulins à vent par centaines et ses paysages uniques, elle exerce une fascination particulière. Je m’y suis rendu plusieurs fois, attiré par sa lumière si spéciale et sa réputation de sanctuaire pour les oiseaux. Mais je l’ai vite compris : pour vraiment apprécier Öland, il faut éviter certains pièges dans lesquels tombent la plupart des visiteurs. Laissez-moi vous guider, en partageant mon expérience, pour que votre voyage soit inoubliable.
Pour nous, Français, s’y rendre est assez simple. Le plus pratique est de prendre un vol pour Kalmar (via Stockholm depuis Paris ou Lyon), puis de louer une voiture. La traversée du pont de l’Öland, gratuit et long de 6 km, est en soi le début de l’aventure. Une voiture est quasi indispensable pour explorer l’île à votre rythme, car les distances sont plus grandes qu’on ne l’imagine.
1. L’erreur fatale de timing pour la migration des oiseaux
C’est l’erreur la plus classique, et je l’ai faite lors de mon premier séjour en plein mois d’août. L’île était magnifique, mais le ciel relativement calme. Le véritable spectacle, celui qui fait la renommée mondiale d’Öland, se déroule pendant des fenêtres très précises. Le point culminant de la migration d’automne se situe entre la semaine 40 et 42, soit de fin septembre à mi-octobre. C’est à ce moment-là que des dizaines de milliers d’oiseaux limicoles et d’oies arctiques font escale ici avant leur grande traversée de la Baltique.
La pointe sud de l’île, dans la réserve naturelle d’Ottenby, devient alors un opéra naturel. Le son de milliers d’oiseaux est assourdissant et le spectacle visuel inoubliable. J’y suis retourné en octobre, et l’expérience était incomparable. Le ciel était littéralement zébré d’oiseaux. Mon conseil : si l’ornithologie vous intéresse un minimum, planifiez votre voyage autour de cette période ou lors de la migration de printemps, fin avril et en mai, qui est tout aussi spectaculaire.
2. Sous-estimer l’équipement nécessaire

Arriver à Ottenby sans jumelles, c’est un peu comme visiter le Louvre les yeux bandés. On voit les formes générales, mais on manque tous les détails qui font la magie du lieu. Lors de ma visite, j’ai vu des familles plisser les yeux pour tenter de distinguer une forme lointaine, tandis qu’à côté, des passionnés équipés de longues-vues s’émerveillaient des détails du plumage d’un bécasseau. C’est frustrant.
Nul besoin d’investir 2000 € dans du matériel professionnel. Mais une bonne paire de jumelles (type 8×42 ou 10×42) transforme radicalement l’expérience. Si vous n’en avez pas, pas de panique. Le centre d’accueil des visiteurs, le Naturum Ottenby, propose du matériel de qualité en location. Comptez environ 150-200 SEK (environ 13-18 €) pour la journée. C’est le meilleur investissement que vous puissiez faire pour vraiment vous connecter à la nature de l’île.
3. Ignorer les règles du patrimoine mondial de l’UNESCO

Une grande partie du sud d’Öland, le « Stora Alvaret », est classée au patrimoine mondial de l’UNESCO. Ce n’est pas un paysage agricole comme les autres. C’est une immense plaine de calcaire, une sorte de steppe à la végétation unique au monde, façonnée par des millénaires de pastoralisme. L’ambiance y est presque lunaire, surtout au lever ou au coucher du soleil.
Cependant, cet écosystème est extrêmement fragile. L’erreur est de penser qu’on peut s’y promener n’importe où. Du 1er avril au 15 novembre, des zones de protection strictes sont mises en place pour protéger les oiseaux nicheurs au sol et la flore délicate. Respectez scrupuleusement les sentiers balisés et les panneaux d’interdiction. Ils ne sont pas là pour vous embêter, mais pour préserver ce qui rend ce lieu si exceptionnel. J’ai vu des touristes s’aventurer hors des chemins pour une photo, sans réaliser qu’ils pouvaient écraser des orchidées rares ou déranger un nid. Pensez-y comme aux sentiers du littoral en Bretagne ou dans les Calanques : on reste sur le chemin pour que tout le monde puisse en profiter pendant des années.
4. Manquer l’expérience royale (et son contexte)
Beaucoup de visiteurs, concentrés sur la nature, oublient qu’Öland est aussi le lieu de villégiature estivale de la famille royale suédoise. Le palais de Solliden n’est pas qu’une simple attraction touristique. C’est un lieu vivant. L’erreur est de ne pas vérifier les dates d’ouverture, qui coïncident avec la saison estivale.
Ce que j’apprécie à Solliden, c’est l’atmosphère. Oubliez la pompe de Versailles ; ici, l’ambiance est étonnamment détendue. On se promène dans de magnifiques jardins (l’entrée coûte environ 160 SEK, soit 14 €), on peut prendre un café dans le très agréable Kaffetorpet, et il n’est pas rare d’apercevoir des membres de la famille royale de loin. Attention : le palais lui-même ne se visite pas, seuls les parcs et jardins sont ouverts au public. C’est une plongée fascinante dans le style de vie de la royauté la plus « normale » d’Europe. Juste à côté, les ruines imposantes du château de Borgholm méritent également une visite pour un contraste historique saisissant.
5. Passer à côté de la grande histoire derrière les oiseaux
La cinquième erreur est de voir les oiseaux sans comprendre pourquoi leur présence ici est si importante. Le centre Naturum d’Ottenby n’est pas qu’un musée. C’est la vitrine de l’une des plus anciennes stations de baguage et d’étude des oiseaux au monde. J’ai eu la chance de discuter avec l’un des chercheurs qui m’a expliqué que les données collectées ici depuis les années 1940 sont une mine d’or pour comprendre l’impact du changement climatique.
Ils constatent que les oiseaux arrivent plus tôt au printemps, que certaines espèces ne migrent plus aussi loin vers le sud… Visiter l’exposition ou, si vous en avez l’occasion, assister à une démonstration de baguage, donne une profondeur incroyable à votre observation. Vous ne voyez plus juste un oiseau, mais un messager, un indicateur de la santé de notre planète. C’est une perspective qui change tout et qui rend le voyage à Öland encore plus poignant.
Mes conseils pratiques pour un séjour réussi
Pour l’hébergement, Borgholm est la « capitale » animée avec hôtels et restaurants. Pour une expérience plus calme et proche de la nature, je vous conseille de louer une « stuga » (un petit chalet en bois) dans le sud de l’île. On en trouve à partir de 900 SEK (environ 80 €) la nuit. Côté gastronomie, ne partez pas sans avoir goûté les « kroppkakor », des boulettes de pomme de terre farcies, plat typique de l’île. C’est rustique, roboratif, mais délicieux après une longue journée de marche. Öland est une destination qui se mérite et se prépare un minimum, mais qui offre en retour une sensation de paix et de connexion à la nature brute que l’on trouve rarement ailleurs.