10000 grues et plages FKK dans cette ancienne mine allemande

Quand on pense au Brandebourg, en Allemagne, on imagine souvent les forêts et les lacs qui entourent Berlin. Mais cette région cache une histoire bien plus surprenante, celle d’une transformation radicale. J’y suis allé un peu par hasard, attiré par une histoire qui semblait trop belle pour être vraie : une mine de charbon à ciel ouvert de 100 hectares, devenue un paradis pour des milliers d’oiseaux migrateurs, tout en accueillant des plages familiales et naturistes. Ce lieu, c’est le Grünewalder Lauch, et mon expérience là-bas a dépassé tout ce que j’avais pu lire.

Du charbon aux grues : une métamorphose vivante

Depuis 1960, le Grünewalder Lauch, autrefois une cicatrice béante dans le paysage de la Lusace, a entamé une renaissance écologique spectaculaire. Mais c’est en automne que la magie opère vraiment. Chaque année, un spectacle à couper le souffle s’y déroule : jusqu’à 10 000 grues cendrées font escale ici lors de leur migration vers le sud. J’ai eu la chance d’assister à ce phénomène, et je peux vous dire que les photos ne lui rendent pas justice. Le son de milliers d’oiseaux se posant sur l’eau au crépuscule est quelque chose d’absolument envoûtant, presque préhistorique.

Mon conseil : pour vivre pleinement cette expérience, venez soit à l’aube, soit au coucher du soleil entre fin septembre et début novembre. C’est à ce moment que les oiseaux quittent ou rejoignent leurs dortoirs sur le lac. J’ai participé à une visite guidée avec une ranger locale, Susann Nitzsche. Pour environ 15 €, elle nous a emmenés aux meilleurs points d’observation et nous a partagé des anecdotes passionnantes sur la vie des grues. Ça valait chaque centime, car sans elle, j’aurais manqué la moitié des détails fascinants.

L’étonnante cohabitation des plages

Ce qui rend le Grünewalder Lauch si unique, c’est cette cohabitation surprenante entre la protection de la nature et les loisirs. Sur les rives du lac, on trouve des plages textiles classiques, des plages naturistes (FKK, pour Freikörperkultur, une véritable institution en Allemagne de l’Est) et même une plage pour les chiens. En tant que Français, cette mixité m’a d’abord surpris. On a tendance à tout vouloir compartimenter. Ici, tout le monde coexiste dans le respect mutuel. Des familles jouent au ballon à quelques centaines de mètres d’un groupe d’ornithologues scrutant l’horizon avec leurs jumelles, non loin de la zone FKK. C’est une leçon de tolérance à ciel ouvert.

Les plages sont bien entretenues, avec du sable fin et une eau d’une clarté impressionnante. L’été, c’est un lieu de baignade très prisé. J’y ai passé un après-midi en août, et nager dans cette eau pure en sachant qu’on se trouve au fond d’une ancienne mine est une sensation assez incroyable. On peut même s’offrir une Currywurst et une bière fraîche dans un des petits kiosques (*Imbiss*) pour environ 8 €.

Un miracle écologique que l’on peut toucher

La qualité de l’eau est remarquable. Depuis 2014, le lac respecte les normes européennes très strictes pour les eaux de baignade, une preuve éclatante du succès de la renaturation. Pour une région marquée pendant des décennies par l’industrie minière, c’est un véritable exploit. On oublie vite le passé industriel, même si certains reliefs aux alentours rappellent encore les formes sculptées par les excavatrices géantes. C’est ce contraste qui rend le lieu si puissant.

Conseils pratiques pour votre visite au Grünewalder Lauch

Explorer cette région, appelée la Lausitzer Seenland (la région des lacs de Lusace), demande un peu d’organisation, mais c’est très accessible.

Comment s’y rendre ?

Depuis Berlin, le plus simple est de prendre un train régional pour Senftenberg (environ 2 heures de trajet, les billets comme le Deutschland-Ticket à 49 € par mois sont parfaits pour ça). De Senftenberg, des bus locaux desservent les alentours du lac, mais louer une voiture offre une bien plus grande liberté pour explorer les autres lacs de la région. Sinon, la location de vélo est une excellente option. J’ai payé 15 € pour la journée à Senftenberg et j’ai pu longer les pistes cyclables parfaitement aménagées qui relient les différents lacs.

Où dormir et manger ?

Pour une immersion totale, le camping Grünewalder Lauch est idéal, avec des emplacements corrects à partir de 25 € la nuit pour une petite tente et une voiture. Si vous préférez plus de confort, la ville de Senftenberg propose de nombreux hôtels et appartements de vacances (*Ferienwohnungen*) à partir de 70-80 € la nuit. Pour dîner, je vous recommande de quitter les snacks du bord de lac et d’aller au port de Senftenberg. Le restaurant Pier 19 offre une très belle vue et de bons plats de poisson pour environ 25-35 € par personne.

Plus qu’un lac, un symbole d’avenir

Le Grünewalder Lauch n’est pas un cas isolé. Toute la région est un laboratoire de transformation. En vous baladant, vous découvrirez d’autres lacs aux histoires folles : le lac de Lusace, profond de 41 mètres, qui abrite un village englouti, ou encore le Geierswalder See où des maisons flottantes futuristes sont amarrées. Une nuit dans l’une d’elles est un luxe (souvent plus de 250 €), mais l’architecture est fascinante à observer.

Ce voyage au Grünewalder Lauch a été bien plus qu’une simple découverte touristique. C’est une bouffée d’optimisme, la preuve que la nature, avec un peu d’aide, peut non seulement guérir ses blessures mais aussi créer quelque chose de nouveau et de magnifique. C’est un lieu qui nous rappelle que même les paysages les plus abîmés peuvent avoir un avenir radieux. Un joyau à découvrir, pour les oiseaux, pour la baignade, et pour l’inspiration.