J’ai passé un bout de temps dans les coulisses de la mode, assez pour voir les tendances naître et mourir à une vitesse folle. Mais il y en a une qui n’a jamais vraiment bougé : le streetwear. Franchement, il n’a pas juste survécu, il a fini par s’imposer partout. Pourquoi ? Parce que ce n’est pas qu’une affaire de fringues. C’est une attitude, une culture, une façon de raconter quelque chose sans ouvrir la bouche.
Au début, on me demandait souvent des looks un peu clichés, avec des logos énormes et des couleurs qui flashent. C’était l’image d’Épinal du streetwear. Mais en discutant avec des passionnés, des skateurs aux créateurs pointus, j’ai capté le truc. Le vrai streetwear, celui qui a de la gueule, se cache dans les détails : la coupe d’un sweat, la densité d’une toile de jean, la robustesse d’une couture. C’est un langage subtil.
Cet article, ce n’est pas une énième liste de pièces « à la mode ». Oubliez ça. Je vais plutôt vous partager ce que j’ai appris sur le terrain. Comment choisir des vêtements qui vont vraiment durer et comment les assembler pour créer une silhouette qui a du sens. L’idée, c’est de vous aider à construire un style qui vous ressemble, sans vous déguiser.
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Les Fondations : Tout Part de la Matière
Avant même de parler de marques ou de logos, parlons de ce qui fait un bon vêtement. Un style streetwear crédible repose sur la qualité. On ne peut pas tricher là-dessus, un mauvais tissu se voit et se sent immédiatement.
Le premier réflexe d’un connaisseur, ce n’est pas de lire une étiquette, c’est de toucher. C’est ce qu’on appelle avoir « la main ».
Pour les sweats et t-shirts : Un bon t-shirt streetwear doit être lourd, épais. Cherchez des grammages d’au moins 200 g/m². Pour un sweat à capuche (ou hoodie), on vise le 350 g/m² ou plus. Ce poids donne une vraie structure, un tombé impeccable qui ne se déformera pas au premier lavage. Vous trouverez souvent du molleton gratté (super doux et chaud à l’intérieur) ou du non gratté, avec ses petites bouclettes, qui respire mieux.
Le denim, ce pilier : Le jean est essentiel. Le graal, c’est souvent le denim selvedge, reconnaissable à son petit liseré coloré quand on retourne le bas du pantalon. Il est tissé plus lentement, ce qui le rend dense et hyper résistant. Un jean en toile brute (raw denim) sera raide comme du carton au début. C’est normal ! Il faut le porter, le « faire », pour qu’il s’assouplisse et se moule à votre corps. Patience, le jeu en vaut la chandelle.
Les tissus techniques : Le streetwear a toujours pioché dans le fonctionnel. Les matières imperméables et respirantes ou les toiles ultra résistantes à l’abrasion ne sont pas juste là pour le style. Elles viennent du sport, de l’armée ou des vêtements de travail et apportent une vraie performance.
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Votre Premier Look Streetwear pour Moins de 300€
Pas besoin de casser sa tirelire pour se lancer ! On peut construire une base solide avec un budget raisonnable. L’idée est d’investir dans la polyvalence.
Voici un « starter pack » qui fonctionne à tous les coups :
Un T-shirt Lourd (environ 30-40€) : Oubliez les lots de t-shirts fins. Investissez dans une seule bonne pièce, blanche ou noire. Des marques comme Uniqlo U proposent d’excellents basiques épais qui tiennent la route.
Un Hoodie de Qualité (environ 80-120€) : C’est la pièce maîtresse. Cherchez-en un avec une capuche qui se tient, des œillets en métal et une coupe un peu carrée (boxy). Des marques de workwear ou de skate proposent souvent un excellent rapport qualité-prix.
Un Jean Droit ou un Cargo (environ 60-90€) : Pas besoin de viser le denim japonais pour commencer. Un bon jean brut d’une marque classique ou un pantalon cargo en toile solide feront parfaitement l’affaire. Regardez du côté des surplus militaires pour des cargos authentiques et pas chers.
Une Paire de Baskets Iconiques (environ 80-110€) : Misez sur une silhouette intemporelle qui va avec tout. Pensez aux classiques du basket, du skate ou du tennis. Une paire en cuir blanc ou en toile noire est un investissement sûr.
On arrive à un total qui peut tourner autour de 250-350€ pour une base complète, durable et stylée. C’est bien plus malin que d’acheter dix articles bas de gamme qui ne tiendront pas la saison.
L’Art d’Assembler les Pièces : Tout est dans la Silhouette
Avoir les bonnes pièces, c’est 50% du travail. Le reste, c’est la façon de les porter. Jouer avec les volumes est la règle d’or.
L’équilibre des volumes : La règle la plus simple et efficace. Si vous portez un haut ample (un hoodie oversize), calmez le jeu en bas avec un jean droit ou une coupe plus ajustée. Ça évite l’effet « sac à patates ».
Jouer avec la superposition (layering) : C’est le secret pour donner de la profondeur à un look. Laissez un t-shirt un peu plus long dépasser sous un sweat plus court. Portez une surchemise ouverte sur un t-shirt. Chaque couche visible ajoute de la texture et de l’intérêt.
Adapter la coupe à sa morpho : La fameuse coupe boxy (carrée et un peu courte) est géniale, mais elle a tendance à tasser un peu. Si vous êtes plutôt petit, elle peut être super pour équilibrer la silhouette. Si vous êtes grand et fin, une coupe un peu plus longue vous mettra sans doute plus en valeur. N’hésitez pas à essayer !
D’ailleurs, parlons des erreurs classiques qui peuvent plomber un look. Attention à ne pas tomber dans ces pièges !
Les 3 erreurs qui tuent un look streetwear : 1. L’overdose de logos : Un look réussi n’est pas un panneau publicitaire. La subtilité est bien plus élégante. 2. Ignorer les matières : Un sweat qui a l’air cheap ou des baskets en plastique bas de gamme ruineront même la meilleure des tenues. 3. Le mauvais équilibre : Un haut oversize avec un bas ultra large, ça peut vite donner une allure négligée si les matières ne sont pas assez rigides.
Chiner et Personnaliser : La Touche Finale
Les plus belles pièces sont souvent celles qui ont une histoire. Le vintage et la seconde main sont vos meilleurs alliés pour un style unique.
Sur les plateformes comme Vinted ou dans les friperies, la patience est la clé. Mais la récompense est une pièce que personne d’autre n’aura. Petit conseil de recherche : pour trouver des pépites, utilisez des mots-clés précis. Tapez « sweat université US », « veste workwear vintage », « jean selvedge », ou « pantalon militaire M65 ». Vous serez surpris des trésors qu’on peut dénicher !
Et n’oubliez pas les accessoires. Ils sont la ponctuation de votre style. Un simple bonnet bien choisi, un sac en toile robuste (tote bag) ou une chaîne fine peuvent transformer un look simple en une déclaration de style réfléchie.
L’Entretien, le Vrai Secret de la Durabilité
Un style durable, c’est aussi un style qui dure dans le temps. Prenez soin de vos vêtements, ils vous le rendront.
Quelques règles simples : lavez vos sweats et t-shirts imprimés à l’envers et à 30°C maximum. Et s’il vous plaît, fuyez le sèche-linge ! C’est l’ennemi juré du coton, il le fait rétrécir et abîme les fibres. Un séchage à l’air libre, à plat pour les pièces lourdes, et c’est tout.
Pour illustrer l’importance de la qualité, comparons deux approches. Vous pouvez acheter un t-shirt en grande surface pour 10€. Il sera fin, probablement déformé après cinq lavages. Ou alors, vous investissez 30€ dans un t-shirt plus épais, mieux coupé. Ce dernier gardera sa forme et son allure pendant des années. Au final, c’est l’option la plus économique et la plus stylée.
Un dernier mot sur le jean brut : pour obtenir cette patine unique, le fameux délavage personnalisé, armez-vous de patience. Certains puristes recommandent de le porter au moins 6 mois tous les jours avant de le laver pour la première fois ! Je me souviens de mon premier, il tenait littéralement debout tout seul au début. C’est un processus, mais le résultat est incomparable.
En Bref : Votre Style, Vos Règles
Le streetwear est né d’une envie de créer ses propres codes, loin des podiums et des magazines. Gardez cet esprit en tête. Apprenez les bases, maîtrisez les classiques, et ensuite, amusez-vous. Le vêtement le plus cool ne sera jamais celui avec le plus gros logo, mais celui dans lequel vous vous sentez vraiment vous-même. Confiant, à l’aise et libre.
Galerie d’inspiration
Un jean selvedge, ça vaut vraiment le coup ?
Absolument. Au-delà du liseré iconique, un jean selvedge brut (souvent japonais, comme chez Edwin ou Japan Blue) est un investissement dans le temps. Il se moule à votre corps, se délave de manière unique et raconte votre histoire. Les premiers ports sont rigides, c’est le processus. Ne le lavez pas avant six mois pour créer des marques de délavage (fades) authentiques et personnelles.
« Le streetwear, c’est essentiellement une conversation entre le logo, le porteur et celui qui regarde. » – Virgil Abloh
Cette idée du regretté créateur d’Off-White et directeur artistique de Louis Vuitton Homme résume tout. Votre tenue n’est pas passive ; elle communique. Choisir une pièce, c’est choisir de participer à cette conversation culturelle.
Focus silhouette : Oubliez un instant les marques et regardez-vous dans le miroir. L’harmonie des volumes est essentielle. Si vous portez un pantalon ample ou un cargo large, équilibrez avec un haut plus ajusté (comme un t-shirt rentré ou un sweat court). À l’inverse, un hoodie oversize fonctionnera à merveille avec un jean plus droit ou un legging.
Bien choisir un t-shirt graphique, c’est tout un art. Voici trois règles pour ne pas se tromper :
La référence : Est-elle pointue, drôle, ou juste un logo vide de sens ? Un t-shirt d’un label de musique indépendant ou d’un skate shop local aura toujours plus d’âme.
La qualité de l’impression : Privilégiez la sérigraphie, qui vieillit bien, à l’impression numérique bas de gamme qui craquelle et s’efface vite.
Le placement : Un petit logo brodé sur le cœur est plus subtil qu’un énorme visuel qui couvre tout le torse.
Le Japon produit moins de 1% du denim mondial, mais il est considéré par les puristes comme le meilleur en termes de qualité, de texture et de techniques de teinture à l’indigo.
C’est pourquoi des marques comme Momotaro ou Studio D’Artisan sont des références absolues. Leur souci du détail, des métiers à tisser vintage à la couture, crée des pièces conçues pour durer toute une vie, pas seulement une saison.
Sneaker iconique A : La Nike Air Force 1 ’07 blanche. Polyvalente, passe-partout, son design n’a pas bougé depuis les années 80. Elle ancre n’importe quelle tenue, de la plus simple à la plus audacieuse.
Sneaker iconique B : La New Balance 990v5 grise. Plus technique, associée à une esthétique
Une tenue confortable toute la journée.
Une silhouette structurée qui ne s’affaisse pas.
Une durabilité qui traverse les années.
Le secret ? Investir dans un hoodie de qualité supérieure. Oubliez la fast fashion et cherchez des marques comme Champion et sa technique brevetée
Ne sous-estimez jamais le pouvoir des chaussettes. Une paire blanche impeccable, légèrement côtelée et qui monte juste assez haut sur la cheville (comme celles de Stance ou Uniqlo) peut transformer une tenue. C’est le détail qui montre que rien n’est laissé au hasard, le pont parfait entre le bas de votre pantalon et vos sneakers.
Vous voyez de plus en plus de polaires techniques et de pantalons de randonnée en ville ? C’est le
Saviez-vous que Carhartt a été fondée en 1889 à Detroit pour fabriquer des salopettes en toile
L’erreur à éviter : L’over-branding. Porter un total look d’une seule marque de la tête aux pieds (surtout si elle est très visible) est souvent le signe d’un débutant. Le vrai style naît des associations personnelles, du mélange des genres et des marques. Un seul logo fort suffit.
Comment entretenir ses sneakers pour qu’elles durent ?
Investissez dans un bon kit de nettoyage comme ceux de Jason Markk ou Crep Protect. Pour le quotidien, un coup de brosse douce après chaque port enlève la poussière. Contre les taches, agissez vite avec une solution adaptée. Et surtout, oubliez la machine à laver, qui déforme les chaussures et décolle les semelles.
La quête du vintage et de la seconde main est au cœur du streetwear durable. Sur des plateformes comme Vinted, Grailed ou Vestiaire Collective, cherchez des termes précis :
Le layering, ou l’art de la superposition, n’est pas qu’une question de style, c’est aussi fonctionnel. La base parfaite est un t-shirt de qualité. Par-dessus, une surchemise ouverte (en flanelle ou en toile épaisse). En dernière couche, un blouson aviateur ou une veste technique. Chaque couche doit pouvoir se suffire à elle-même.
Option A : Veste en cuir neuve. Elle sera rigide, parfaite, mais sans âme. Il faudra des années pour la
Selon une étude de la Fondation Ellen MacArthur, l’équivalent d’un camion poubelle de textiles est mis en décharge ou incinéré chaque seconde dans le monde.
Choisir un sweat plus épais, un jean plus robuste ou une paire de chaussures bien construite n’est pas qu’un choix stylistique. C’est un acte concret contre la mode jetable et pour une consommation plus réfléchie.
Le couvre-chef est la ponctuation de votre look. Un simple bonnet de docker (court, au-dessus des oreilles) de chez Le Bonnet ou une casquette de baseball classique avec un logo discret (pensez ’47 Brand) finalise une tenue. Choisissez des matières nobles comme la laine mérinos pour l’hiver ou le coton sergé pour l’été.
Comment s’inspirer du style japonais sans tomber dans le cliché ?
Observez leur approche du vêtement, appelée
L’astuce subtile : les bijoux. Le streetwear moderne a laissé derrière lui les chaînes bling-bling. La tendance est à la finesse : une chaîne en argent discrète, une bague chevalière simple, une gourmette fine. Ce sont des détails qui ajoutent une touche personnelle sans surcharger la silhouette.
Une coupe parfaite qui ne se déforme pas.
Une douceur qui s’améliore avec le temps.
Une sensation de poids et de protection.
Le secret ? Un t-shirt
« On ne faisait pas du skate pour être cool. On était cool parce qu’on faisait du skate. Le style venait de la fonction. » – Tony Alva, skateur légendaire.
Cette mentalité est l’ADN du streetwear. Les vêtements larges pour la liberté de mouvement, les chaussures robustes pour la résistance… Le style authentique naît d’un besoin, pas d’une tendance.
La conversation autour du streetwear ne se limite plus à l’opposition entre hip-hop et skate. Aujourd’hui, les frontières sont floues. Un pantalon de survêtement peut être porté avec des mocassins, une robe de soirée avec des sneakers. L’authenticité, c’est de créer votre propre dialecte stylistique en piochant dans ces différentes cultures.
Le dilemme du cargo :
Version classique : Le pantalon cargo en sergé de coton (comme chez Carhartt ou Stan Ray) offre un look workwear intemporel, solide et qui se patine joliment.
Version technique : Le cargo en nylon ou en Ripstop, souvent doté de zips et de sangles, s’inscrit dans une veine plus moderne et fonctionnelle, inspirée de l’outdoor.
Le premier est un pilier, le second une déclaration de style plus pointue.
Pensez votre garde-robe streetwear comme une collection. Chaque pièce doit avoir sa raison d’être. Commencez par les fondations : un jean brut de qualité, un hoodie gris chiné épais, un t-shirt blanc impeccable, une paire de sneakers iconiques et une veste intemporelle (en jean ou type Harrington). Une fois ces bases solides acquises, vous pourrez ajouter des pièces plus fortes pour exprimer votre personnalité.
Designer d'Intérieur & Consultante en Art de Vivre Domaines de prédilection : Aménagement intérieur, Éco-conception, Tendances mode
Après des années passées à transformer des espaces de vie, Laurine a développé une approche unique qui marie esthétique et fonctionnalité. Elle puise son inspiration dans ses voyages à travers l'Europe, où elle découvre sans cesse de nouvelles tendances et techniques. Passionnée par les matériaux durables, elle teste personnellement chaque solution qu'elle recommande. Entre deux projets de rénovation, vous la trouverez probablement en train de chiner dans les brocantes ou d'expérimenter de nouvelles palettes de couleurs dans son atelier parisien.