Suriname : Découverte d’une veine d’or exceptionnelle

C’est le genre de découverte qui peut redéfinir l’avenir d’une entreprise et influencer l’économie d’une nation. Au cœur de la jungle du Suriname, la société minière Founders Metals Inc. vient d’annoncer des résultats de forage qui font rêver les géologues du monde entier. Le troisième trou de forage sur leur cible de Maria Geralda a révélé une intersection spectaculaire : 22,5 mètres de carotte rocheuse contenant de l’or à une teneur de 11,88 grammes par tonne (g/t). Un chiffre qui, dans le secteur minier, est synonyme de très haute qualité et de potentiel économique majeur.
Ce gisement se situe à environ 5 kilomètres au sud-est du camp de Lower Antino, dans une zone qui, jusqu’au printemps dernier, n’avait jamais été touchée par une foreuse. La découverte n’est pas un coup de chance isolé. Elle s’inscrit dans un programme d’exploration mené sur une zone de 400 par 500 mètres où plus de la moitié des échantillons prélevés présentaient déjà des traces d’or supérieures à 0,1 g/t. Si la présence du métal précieux était donc suspectée, la concentration et l’épaisseur de cette veine ont dépassé les attentes les plus optimistes.
Vincent Combs, géologue structurel chez Founders Metals, décrit la région comme l’un des rares endroits au monde où des systèmes géologiques complexes, liés à des intrusions magmatiques et à des failles, convergent au sein de la même ceinture de roches vertes. Cette configuration géologique unique, héritée de collisions tectoniques paléoprotérozoïques qui ont soudé l’Afrique de l’Ouest au bouclier amazonien, crée les conditions idéales pour la formation de gisements d’or orogéniques de classe mondiale, similaires à ceux qui ont fait la richesse de la région.
Un potentiel économique colossal pour le Suriname

Pour mettre ces chiffres en perspective, la plupart des mines d’or en exploitation dans le monde tournent avec des teneurs moyennes inférieures à 2 g/t. Un gisement affichant près de 12 g/t sur une épaisseur de plus de 20 mètres change radicalement la donne économique d’un projet. Il ne s’agit plus seulement d’extraire de l’or, mais de le faire avec une rentabilité potentiellement très élevée.
Cette nouvelle est d’une importance capitale pour le Suriname, un pays dont l’économie dépend massivement de ses ressources naturelles. Le secteur minier et pétrolier représente déjà près de 60 % de son PIB et quasiment 90 % de ses revenus à l’exportation. Une telle dépendance rend le pays très vulnérable à la volatilité des cours mondiaux des matières premières. L’ajout d’une mine à haute teneur pourrait non seulement générer des revenus substantiels via les impôts et les redevances, mais aussi attirer des investissements étrangers, créer des emplois qualifiés et financer le développement d’infrastructures dans des régions reculées.
Cette découverte s’inscrit dans un contexte régional particulier. Voisin du Suriname, le département français de la Guyane possède une géologie similaire et un secteur aurifère important, mais aussi confronté aux défis de l’orpaillage illégal. Le développement d’un projet minier structuré et responsable de cette envergure au Suriname pourrait avoir des implications géopolitiques, en offrant un modèle de développement alternatif et en renforçant la coopération transfrontalière dans la lutte contre les activités minières clandestines qui dévastent l’environnement.
Entre promesses et périls : les défis à surmonter

Cependant, l’euphorie de la découverte ne doit pas occulter les immenses défis qui se profilent. Le premier est d’ordre environnemental. L’exploitation se situe en pleine forêt amazonienne, un écosystème fragile et vital pour la planète. La construction des routes, des camps et de la mine elle-même devra se faire dans des conditions extrêmes, avec des précipitations annuelles dépassant les 4000 millimètres. Le gouvernement du Suriname, conscient des enjeux, travaille sur des directives visant à équilibrer croissance économique, préservation de la biodiversité et respect des droits des communautés locales.
Car c’est bien là le deuxième défi majeur : le facteur humain. Les terres convoitées sont souvent les territoires ancestraux de communautés autochtones et marronnes. Les chefs des communautés de Tapanaoney et de Lava ont déjà demandé des consultations claires sur l’accès aux terres avant toute délivrance de permis de construire. Founders Metals s’est engagée à respecter le cadre pour une exploitation minière responsable adopté par le Suriname en 2022, qui impose des études d’impact rigoureuses et une transparence sur le versement des redevances. L’histoire minière est pleine d’exemples où la précipitation a mené à des tensions sociales et des dommages irréversibles. Un projet bien mené peut financer des écoles et des dispensaires ; un projet bâclé peut détruire un tissu social et un environnement uniques.
Enfin, il reste le défi économique. Colin Paget, PDG de Founders Metals, a tempéré l’enthousiasme en rappelant que la priorité restait la poursuite du forage. Une seule découverte, aussi spectaculaire soit-elle, ne fait pas une mine. Les investisseurs expérimentés savent que le chemin est encore long. L’entreprise, qui dispose d’un budget pour forer 60 kilomètres d’ici 2025, doit maintenant prouver la continuité et le volume du gisement. Cela implique des dizaines d’autres forages, des levés géophysiques, des études métallurgiques et une analyse économique complexe prenant en compte la logistique, l’énergie et la gestion des déchets.
Les prochains mois seront donc cruciaux. Les échantillons sont envoyés par hélicoptère à Paramaribo pour analyse. Si les résultats confirment le potentiel, une cartographie aérienne par LiDAR affinera le modèle géologique. Les deux années à venir, consacrées à l’exploration et à la collecte de données, détermineront si la promesse de Maria Geralda se transformera en une mine d’or durable et profitable, ou si elle restera une simple, bien que brillante, anomalie géologique dans la jungle surinamaise.