En parcourant les créations de Roche Bobois, une évidence s'impose : chaque fauteuil raconte une histoire. Je me souviens de la première fois que j'ai vu un de ces fauteuils, il semblait à la fois familier et étrangement nouveau, comme un ami qui vous surprend toujours. Les designs, audacieux et élégants, invitent à la contemplation et à la convivialité.
J’ai passé des années dans mon atelier, les mains dans le crin, la mousse et le tissu. Honnêtement, j’ai tout vu passer : des fauteuils de famille chargés d’histoire, des pièces au design incroyable, et… beaucoup de meubles qui étaient juste beaux de loin. Franchement, la question qui revient tout le temps, c’est : « Pourquoi ce fauteuil coûte 1500€ alors que celui-ci, qui lui ressemble, est à 400€ ? »
La réponse n’est pas dans le nom de la marque. Elle est cachée à l’intérieur.
Alors, aujourd’hui, on va décortiquer ça ensemble. Mon but, c’est de vous donner les clés pour regarder un fauteuil avec l’œil d’un pro. Que vous lorgniez sur du neuf, de l’occasion ou que vous pensiez faire appel à un artisan, ces conseils vous feront économiser du temps, de l’argent et pas mal de déceptions. Allez, installez-vous, on passe en coulisses.
1. La Carcasse : Le Squelette Invisible qui Fait Toute la Différence
La première chose à vérifier, c’est toujours la structure. C’est le châssis de votre fauteuil. Une belle carrosserie sur un châssis fragile, ça ne dure jamais. Dans le jargon, on appelle ça la carcasse, et elle représente 90% de la durée de vie du meuble.
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Le bois, le cœur du réacteur
Un fauteuil de qualité est TOUJOURS bâti sur une structure en bois massif. Le plus souvent, c’est du hêtre, un bois dense, dur, qui ne se déforme pas. D’autres essences comme le chêne ou le frêne sont aussi d’excellents choix. Le poids est d’ailleurs un très bon indice. Soulevez un coin du fauteuil. S’il est lourd, c’est bon signe. Un fauteuil 1 place de qualité pèse rarement moins de 25-30 kg. S’il a le poids d’une chaise de cuisine, fuyez !
Attention aux descriptions floues comme « structure en bois ». Ça cache souvent des panneaux de particules (l’agglo) pour les parties non visibles. J’ai vu un jour un fauteuil au design italien magnifique, acheté en ligne, arriver à l’atelier avec un pied cassé net. En démontant, j’ai réalisé que la structure porteuse était en aggloméré… Le pied était fixé avec trois pauvres vis. Une économie de bouts de chandelle qui ne pardonne pas.
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Astuce peu connue : Comment voir si c’est du bois massif ? Penchez-vous et regardez sous le fauteuil, là où le tissu est agrafé au cadre. Souvent, cette partie n’est pas finie et vous pouvez voir le bois brut. Le pin aura des nœuds et un grain large, tandis que le hêtre sera plus uniforme et dense.
Tenons et mortaises : l’art de l’assemblage solide
Un bon bois mal assemblé, ça ne sert à rien. La meilleure méthode, c’est l’assemblage traditionnel par tenons et mortaises. C’est un système d’emboîtement collé qui offre une résistance mécanique incroyable. Les tourillons en bois sont aussi une excellente alternative solide.
Ce qu’il faut absolument éviter, ce sont les fauteuils où tout est juste vissé et agrafé. Avec le temps et la pression, ça prend forcément du jeu et ça commence à grincer.
Le test infaillible : Mettez-vous devant le fauteuil, attrapez fermement les accoudoirs et essayez de le faire bouger de gauche à droite, puis d’avant en arrière. S’il reste parfaitement stable, sans aucun jeu ni grincement, c’est un excellent point.
2. Le Confort : Ce qui se Cache sous le Coussin
Le confort, c’est subjectif, mais les matériaux qui le créent, eux, sont très objectifs. Tout repose sur la suspension et le garnissage.
La suspension : le sommier de votre fauteuil
Sous le coussin, il y a soit des sangles, soit des ressorts. C’est simple.
Les sangles élastiques : C’est une bonne option pour un confort souple. Mais il y a sangles et sangles… Sur un bon fauteuil, elles sont larges, denses, très tendues et surtout entrecroisées. Ça dure 10-15 ans. Sur du bas de gamme, elles sont fines, espacées, non croisées et perdent leur élasticité en 2 ans.
Les ressorts Nosag (ou zigzag) : Ce sont des ressorts en arc qui traversent la carcasse. Franchement, pour la durabilité, c’est le top. Ça offre un soutien plus ferme et c’est quasi indestructible. C’est plus cher, donc c’est souvent un signe de qualité supérieure.
Le garnissage : la densité de la mousse, c’est LA clé !
Ici, un seul chiffre compte : la densité, en kg/m³. C’est ce qui détermine si votre fauteuil va s’affaisser ou non.
Pour faire simple, imaginez ça : une mousse de 20 kg/m³ c’est une éponge de vaisselle, elle s’écrase tout de suite et ne remonte pas. Une mousse Haute Résilience (HR) de 40 kg/m³, c’est comme un matelas à mémoire de forme. Lequel supportera votre poids tous les soirs pendant 10 ans ?
Mousse polyuréthane Haute Résilience (HR) : C’est le standard de la qualité. Pour une assise, ne prenez RIEN en dessous de 35 kg/m³. Idéalement, visez 40 kg/m³ ou plus. Ça vous garantit un confort qui dure.
Mousse polyéther (basse densité) : En dessous de 25 kg/m³, c’est à proscrire pour une assise. Ça s’écrase en un temps record.
Bon à savoir : un vendeur sérieux DOIT pouvoir vous donner la fiche technique avec la densité des mousses. S’il est vague ou refuse, c’est un mauvais signe.
Les 3 Questions à Poser au Vendeur (qui changent tout)
Pour vous sentir armé, voici trois questions à poser qui montrent que vous savez de quoi vous parlez :
« Quelle est la densité exacte de la mousse d’assise en kg/m³ ? » (Si la réponse est « c’est du grand confort », insistez pour le chiffre).
« La structure est-elle bien 100% en bois massif, y compris les traverses cachées ? »
« Pour ce modèle en cuir, s’agit-il de pleine fleur, de fleur corrigée ou de croûte de cuir ? »
Ces trois questions suffisent à trier le bon grain de l’ivraie.
3. Le Revêtement : Tissu ou Cuir, Comment Bien Choisir ?
C’est la partie visible, celle qui subit l’usure, les taches et la lumière. C’est un équilibre entre look et praticité.
Les tissus : le test Martindale ne ment jamais
Pour un tissu, il y a un indicateur de résistance à l’abrasion : le test Martindale. C’est le nombre de tours qu’un disque peut faire sur le tissu avant qu’il ne s’abîme.
20 000 à 40 000 tours : C’est le standard pour un usage domestique normal à intensif.
En dessous de 20 000 tours : C’est pour un fauteuil d’appoint, très peu utilisé.
Au-dessus de 40 000 tours : C’est du très costaud, qualité professionnelle.
Si vous avez une famille avec des enfants et un chien, ne regardez même pas ce qui est en dessous de 30 000 tours. C’est le minimum syndical pour ne pas pleurer dans deux ans.
Les cuirs : attention aux imitations
Il y a une vraie hiérarchie dans le cuir.
Pleine fleur aniline : Le top du top. Le grain est naturel, le toucher est incroyable. Mais c’est le plus fragile, il se tache et se raye facilement. À réserver aux pièces calmes.
Fleur corrigée pigmentée : C’est le meilleur compromis. On a poncé légèrement la surface pour enlever les défauts, puis on l’a protégée avec des pigments. Il est bien plus résistant pour la vie de tous les jours et facile à nettoyer.
Croûte de cuir : À éviter à tout prix pour une assise. C’est la partie inférieure de la peau, recouverte d’un film plastique qui imite le grain. Ça ne respire pas et ça finit toujours par craqueler.
4. Acheter d’Occasion : La Checklist Ultime
L’occasion, c’est une super idée pour trouver des pièces de qualité à bon prix. Mais il faut être vigilant. Voici ma checklist perso :
Le test de la carcasse : On attrape les accoudoirs, on secoue. Ça ne doit pas bouger.
Le test du poids : On le soulève. C’est lourd ? Parfait.
Retournez-le COMPLÈTEMENT ! C’est non négociable. Ça permet de voir l’état des sangles, de repérer des réparations de fortune ou des taches d’humidité.
Pressez l’assise : Appuyez fort au centre. Vous ne devez pas sentir de creux ou la structure en bois en dessous. La mousse doit remonter.
Sentez-le : Une odeur de renfermé ou de tabac froid, c’est quasiment impossible à faire partir. Laissez tomber.
Inspectez les coutures : Surtout aux angles des coussins. Pas de fils tirés, pas de coutures qui s’ouvrent.
5. Et le Prix Dans Tout Ça ?
Parlons budget. Un bon fauteuil neuf, avec une carcasse solide et une mousse HR, c’est un investissement. Il faut compter un budget qui démarre souvent autour de 800-1000€ et qui peut monter bien au-delà pour des pièces de créateur ou des cuirs d’exception.
Et si vous voulez faire refaire un vieux fauteuil ? Une réfection complète (structure, sangles, mousses et tissu) est un gros travail. Comptez entre 800€ et plus de 2000€ selon la complexité du fauteuil et le prix du tissu choisi (qui peut varier de 40€ à plus de 150€ le mètre). C’est souvent 50 à 70% du prix d’un neuf de qualité équivalente, mais c’est le prix pour sauver une pièce de valeur.
Un Achat de Raison et de Cœur
Vous l’aurez compris, choisir un fauteuil, c’est plus qu’une question de couleur. Derrière le prix, il y a des choix techniques qui garantissent sa longévité et votre confort. Un fauteuil bien construit est un compagnon pour la vie, qui se patinera joliment avec le temps.
Maintenant, vous avez les outils pour juger par vous-même. Touchez, testez, retournez, questionnez. N’ayez pas peur d’être curieux. Après tout, un bon fauteuil est un investissement dans votre bien-être quotidien. Et ça, ça n’a pas de prix.
Galerie d’inspiration
Le poids est un indice qui ne trompe pas, comme le souligne l’artisan. Pour aller plus loin, soulevez un angle du fauteuil de quelques centimètres. Si le pied opposé en diagonale se lève quasi-instantanément, le cadre est rigide et bien assemblé. S’il y a une torsion ou un délai, la structure est faible.
Le secret d’une assise qui ne s’affaisse pas ? La mousse Haute Résilience (HR).
Ne vous laissez pas berner par une assise très molle en magasin. Une mousse de qualité, comme une Bultex, a une densité supérieure à 35 kg/m³. En dessous, elle perdra son
Comment savoir si les suspensions sont de qualité ?
Oubliez les simples sangles élastiques entrecroisées, visibles sous l’assise. La Rolls-Royce, ce sont les ressorts nosag (ou
Une couture droite, régulière et serrée.
Des raccords de motifs parfaitement alignés, surtout sur les coussins et aux angles.
Un passepoil net qui souligne les formes sans faire de vagues.
Le secret ? C’est dans ces détails de finition que se mesure le soin apporté à la fabrication. Un atelier qui respecte ces points ne néglige probablement pas la structure invisible.
Cuir pleine fleur : La couche supérieure de la peau, la plus noble et résistante. Elle garde les marques naturelles (cicatrices, grain) et développe une patine magnifique avec le temps. Un investissement pour la vie.
Cuir fleur corrigée : Une peau dont la surface a été poncée pour enlever les imperfections, puis recouverte d’un film pigmenté. Moins
Attention au
Un bon fauteuil ne grince pas, il
Le choix du tissu va au-delà de la couleur. Pensez à sa résistance, mesurée par le test Martindale.
Usage décoratif : 10 000 tours
Usage domestique normal : 15 000 – 20 000 tours
Usage intensif (famille, animaux) : plus de 20 000 tours
Des éditeurs comme Kvadrat ou Pierre Frey affichent toujours ce score. C’est un gage de transparence.
Ne négligez pas la hauteur et la profondeur d’assise. Un fauteuil design très bas et profond, comme le Togo de Ligne Roset, est parfait pour se prélasser, mais peut être difficile pour les personnes âgées ou celles ayant des problèmes de dos qui ont besoin d’un appui plus ferme et d’une assise plus haute pour se relever facilement.
Les pieds sont-ils simplement vissés ?
Sur un fauteuil de qualité, les pieds arrière font souvent partie intégrante de la structure du cadre. C’est un gage de solidité absolue. Si les quatre pieds sont simplement vissés dans des platines métalliques, la prudence est de mise, surtout s’ils sont fins et hauts. Vérifiez la solidité de la fixation.
Velours de coton : Aspect mat, toucher doux, mais peut marquer et attirer la poussière.
Velours de polyester : Très résistant, facile d’entretien, mais peut avoir un aspect plus synthétique et brillant.
Velours de mohair : Le luxe absolu. Éclat incomparable, très résistant, mais aussi le plus coûteux.
Selon la FCBA (Forêt Cellulose Bois-construction Ameublement), la durée de vie moyenne d’un canapé ou fauteuil d’entrée de gamme est de 3 à 5 ans, contre 15 à 20 ans pour un modèle de qualité.
Cet écart s’explique quasi entièrement par la qualité de la carcasse en bois massif et la densité de la mousse, des éléments invisibles à l’achat mais cruciaux sur le long terme.
Le marché de la seconde main est votre meilleur allié. Un fauteuil des années 50-70, même avec un tissu usé, cache souvent une structure en hêtre massif et des ressorts de bien meilleure qualité que le neuf bas de gamme. Un retapissage chez un artisan vous offrira une pièce unique et durable pour un coût total souvent inférieur à un fauteuil design neuf.
L’alternative Alcantara : Souvent confondu avec du daim, l’Alcantara est un textile composite fabriqué en Italie. Extrêmement résistant, durable, respirant et facile à nettoyer, c’est un choix très pertinent pour un fauteuil à usage intensif qui combine l’élégance d’un textile suédé et des performances techniques supérieures.
Une sensation d’enveloppement immédiat.
Un soutien lombaire présent mais pas agressif.
Des accoudoirs à la bonne hauteur pour reposer vos bras sans hausser les épaules.
Le secret ? L’ergonomie. Un bon fauteuil est conçu pour le corps, pas uniquement pour le regard. Prenez le temps de vous y asseoir au moins 5 minutes en magasin.
Tendance forte : le tissu bouclette. Popularisé par des icônes comme le fauteuil Pacha de Pierre Paulin, ce tissu texturé apporte chaleur et confort visuel. Attention cependant à la qualité : une bouclette bas de gamme peut facilement s’accrocher et boulocher. Privilégiez les mélanges laine/acrylique de bonne facture.
Un fauteuil est l’un des rares meubles avec lequel on a un contact physique prolongé. La qualité de son
Option A (Fixe) : Offre une ligne plus pure et un design souvent plus affirmé. Idéal comme pièce maîtresse dans un salon.
Option B (Pivotant) : Apporte de la fonctionnalité et du dynamisme, parfait pour les espaces ouverts où l’on souhaite s’orienter tantôt vers la cheminée, tantôt vers la bibliothèque. Vérifiez la fluidité et le silence du mécanisme.
Le choix dépend de l’usage : le fauteuil est-il une sculpture ou un outil de convivialité ?
Si un coussin d’assise est déhoussable, ouvrez-le (si possible en magasin). L’âme de la mousse doit être protégée par une housse en coutil ou en ouate. Si vous voyez la mousse brute, jaune ou verte, c’est un signe de fabrication économique qui entraînera une usure prématurée du tissu par frottement.
Une icône n’est jamais un hasard : Le fauteuil Eames Lounge Chair (1956) est l’exemple parfait d’une conception où l’ergonomie et la noblesse des matériaux (palissandre moulé, cuir pleine fleur) justifient son statut. Un investissement qui, loin de se déprécier, se transmet et prend de la valeur.
Garnissage traditionnel : Crin végétal ou animal, ressorts. Offre un confort ferme et une aération naturelle. Se restaure entièrement.
Garnissage moderne : Mousse polyuréthane (Bultex, HR…). Confort plus souple et enveloppant. Plus léger, mais se remplace plutôt qu’il ne se restaure.
Pensez à l’entretien. Un fauteuil en cuir se nettoie d’un coup d’éponge mais demande à être nourri une à deux fois par an. Un tissu, même traité anti-taches, sera plus vulnérable. Les housses entièrement déhoussables et lavables en machine sont un avantage considérable pour la durée de vie esthétique de votre fauteuil.
Pourquoi les fauteuils de designers italiens comme ceux de B&B Italia ou Cassina sont-ils si chers ?
Au-delà du nom, ils utilisent souvent une technologie de pointe : un cadre interne en acier noyé dans une mousse polyuréthane injectée à froid. Cette technique, issue de l’industrie automobile, permet des formes complexes, une légèreté surprenante et une durabilité absolue de la forme. C’est de l’ingénierie, pas seulement de l’ébénisterie.
La provenance des matériaux compte. Un cuir tanné en Italie ou un bois certifié FSC/PEFC ne sont pas des arguments marketing vides. Ils garantissent le respect de normes environnementales et sociales, en plus d’être souvent de meilleure qualité.
L’ultime test : Demandez au vendeur de retourner complètement le fauteuil. Observez la finition du dessous. La toile de propreté (le tissu noir qui cache le fond) doit être tendue et proprement agrafée. Des agrafes qui dépassent, une toile lâche ou des fils qui pendent sont les signatures d’un travail bâclé.
Architecte d'Intérieur & Passionnée de Rénovation Ce qui l'anime : Mobilier sur mesure, Projets cuisine & bain, Solutions gain de place
Marion a grandi entourée d'artisans – son père était ébéniste et sa mère décoratrice. Cette immersion précoce lui a donné un regard unique sur l'aménagement intérieur. Aujourd'hui, elle partage son temps entre la conception de projets pour ses clients et l'écriture. Sa spécialité ? Transformer les contraintes en opportunités créatives. Chaque petit espace cache selon elle un potentiel insoupçonné. Les week-ends, elle restaure des meubles anciens dans son atelier niçois, toujours accompagnée de son chat Picasso.