Le Carnaval de Venise comme un habitant : Les secrets d’un artisan masqué

Plongez dans l’univers féérique du Carnaval de Venise, où chaque masque raconte une histoire et chaque événement promet des souvenirs inoubliables.

Auteur Sandrine Morel

Bonjour ! Je ne suis ni un guide, ni un historien. Je suis un artisan, un fabricant de masques. Depuis plus de trente ans, mes mains donnent vie à l’argile et au papier mâché dans mon petit atelier, niché dans une ruelle tranquille de Venise. Chaque année, je vois le Carnaval se réveiller. Pas celui des photos sur papier glacé, mais le vrai, celui qui se vit dans la brume du matin ou dans l’éclat d’un rire partagé.

On me demande souvent des conseils pour « faire » le Carnaval. Franchement, je réponds toujours la même chose : on ne le « fait » pas, on le vit. C’est une immersion, pas un spectacle à cocher sur une liste. Alors, oubliez les programmes et laissez-moi vous guider. Je vais vous parler des masques, bien sûr, mais aussi de l’état d’esprit, des astuces pour dénicher les bons plans et des erreurs à ne surtout pas commettre.

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Au-delà du folklore : L’âme véritable du Carnaval

Avant même de penser à votre costume, il faut comprendre le pourquoi du comment. Le Carnaval de Venise, ce n’est pas juste une fête. C’est un héritage social, une soupape de sécurité inventée il y a des siècles, quand la République de Venise était une grande puissance.

L’idée, déclarée comme fête officielle il y a bien longtemps, était brillante : offrir au peuple une période où toutes les barrières sociales tombaient. Le masque n’était pas un simple déguisement, c’était un outil de liberté. Sous un masque, un serviteur pouvait interpeller un noble, les identités et les conflits étaient mis en pause. C’était vital pour maintenir la paix dans une ville aussi dense et hiérarchisée.

Comprendre ça change tout. Porter un masque, ce n’est pas se cacher. C’est jouer un rôle dans une immense pièce de théâtre à ciel ouvert. Voilà pourquoi un masque en plastique acheté à la va-vite n’aura jamais le même impact qu’un masque artisanal. L’un est un produit, l’autre est un morceau d’âme.

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Les masques vénitiens : Secrets d’atelier et comment ne pas se tromper

Ah, les masques… c’est mon domaine ! La fabrication traditionnelle est un art lent, méticuleux. Tout part d’une sculpture en argile, le « positif », qui demande une bonne connaissance de l’anatomie pour que le masque soit confortable. De là, on crée un moule en plâtre.

Ensuite, c’est le moment du papier mâché, la cartapesta. On trempe des bandes de papier dans une colle maison (à base de farine, un secret d’artisan !) et on les applique délicatement dans le moule, couche après couche. Après un long séchage, on démoule, on ponce, on enduit, on ponce encore… jusqu’à obtenir une surface lisse comme de la porcelaine. C’est cette patience qui fait toute la différence.

Astuce d’expert : Reconnaître un vrai masque artisanal

Les rues de Venise débordent de masques, mais 95% sont des importations industrielles. Alors, comment repérer la perle rare ? C’est simple si vous savez où regarder.

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  • Regardez à l’intérieur : Un vrai masque en papier mâché n’est pas lisse à l’intérieur. Vous devriez voir la texture des bandes de papier superposées. Le plastique, lui, est uniforme.
  • Soupesez-le : Le papier mâché est incroyablement léger. Si le masque vous semble lourd, c’est probablement de la résine ou du plâtre pressé.
  • Le prix, un indice fiable : Un masque artisanal demande des heures de travail. Un petit masque simple comme une Colombina démarre autour de 25-35€. Pour une Bauta ou un Medico della Peste décoré, les prix peuvent grimper. Méfiez-vous des offres trop alléchantes !
  • Cherchez la signature : La plupart des artisans signent ou tamponnent leur travail à l’intérieur. C’est un gage de fierté et d’authenticité.

Acheter un masque authentique, c’est ramener un véritable souvenir et soutenir un artisanat local qui se bat pour exister. D’ailleurs, si vous avez l’âme créative, certains ateliers proposent des stages pour décorer votre propre masque. Comptez environ 2 heures et un budget de 50€ à 70€ pour repartir avec votre création unique. Une super expérience !

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Les grands classiques et leur signification

Chaque masque raconte une histoire. Le Medico della Peste, avec son long bec, n’était pas un masque de fête à l’origine, mais l’équipement des médecins durant les épidémies. La Bauta, ce masque blanc qui couvre tout le visage, permettait de boire et de manger, garantissant un anonymat total. La Moretta, un petit ovale de velours noir, était un masque de séduction muet, tenu en place par un bouton que l’on mordait. Choisir son masque, c’est choisir son personnage !

Se composer un personnage : Costume et budget

Le masque, c’est la clé, mais le costume fait toute la différence. On ne se tient pas de la même façon en jean-baskets qu’avec une cape de velours !

La location : l’option de luxe

Pour vivre l’expérience à fond, la location d’un costume d’époque est incroyable. Venise compte plusieurs ateliers renommés pour ça. Attention, il faut s’y prendre très à l’avance et prévoir un budget conséquent, souvent entre 150€ et plus de 500€ pour la journée. C’est un investissement, mais la transformation est totale.

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L’alternative maligne et économique

Pas besoin de casser sa tirelire ! Vous pouvez créer un personnage très crédible avec un peu d’astuce. L’important, c’est la cohérence. Voici une petite liste de courses pour une tenue élégante et authentique à moins de 150€ :

  • Un long manteau ou une cape noire (le tabarro) : Cherchez dans les friperies ou en ligne, on en trouve de très corrects pour 50-80€.
  • Un tricorne noir : Indispensable pour la silhouette. Comptez environ 30€.
  • Des gants noirs et une simple Bauta blanche : L’ensemble parfait pour un anonymat total et historiquement juste.

Et voilà ! L’essentiel est de cacher les éléments modernes. Laissez les baskets et le sac à dos à l’hôtel. L’illusion doit être parfaite.

Vivre le vrai Carnaval, loin des sentiers battus

C’est sans doute mon conseil le plus précieux. Le cœur du Carnaval ne bat pas sur la Place Saint-Marc à 14h, au milieu des perches à selfie. Le vrai spectacle est ailleurs.

Les heures magiques

Le Carnaval appartient à ceux qui se lèvent tôt et se promènent tard.

Tentez l’expérience : soyez sur la Place Saint-Marc à 7h du matin. Dans la brume et le silence, vous croiserez quelques silhouettes costumées, des photographes… l’atmosphère est absolument mystique. Le soir, c’est une autre magie. Une fois la foule repartie, promenez-vous masqué dans les ruelles sombres. Croiser un autre masque, échanger un salut de la tête… c’est ça, le vrai jeu du Carnaval.

Sortez des grands axes !

Fuyez la foule entre le Rialto et Saint-Marc. Perdez-vous ! Explorez les quartiers plus calmes comme Cannaregio, Castello ou Dorsoduro. Pour vous lancer, commencez par le Campo Santa Margherita, très vivant avec ses étudiants et ses familles, ou perdez-vous autour du Campo San Giacomo dall’Orio. Vous y découvrirez un carnaval plus intime, plus authentique.

Et le soir ? L’ambiance se trouve dans les bacari (les bars à vin locaux). Poussez la porte, commandez une ombra (un petit verre de vin) et des cicchetti (des tapas vénitiennes). C’est là que la vie locale continue, même pendant le Carnaval.

Les saveurs du Carnaval : Une pause gourmande s’impose

Goûter le Carnaval, c’est aussi une affaire de papilles ! En cette période, deux douceurs sont incontournables : les frittelle et les galani. Les premières sont des beignets ronds et moelleux, nature, à la crème ou au zabaione. Les seconds sont des rubans de pâte frite, fins et croustillants, recouverts de sucre glace.

Mon petit plaisir ? Après avoir marché des heures dans le froid, rien de tel qu’une frittella veneziana encore chaude. Vous verrez des pâtisseries avec des files d’attente qui ne trompent pas… C’est souvent là que se trouvent les meilleures !

Conseils pratiques pour un séjour sans accroc

Venise pendant le Carnaval, ça se prépare un minimum.

Attention aux pickpockets ! Une foule dense, c’est une aubaine pour eux. Pas de paranoïa, juste du bon sens : pas d’objets de valeur dans les poches arrière, le sac à dos porté devant vous dans les zones bondées, et le passeport au coffre de l’hôtel.

Gare à l’Acqua Alta : C’est la montée des eaux, fréquente en hiver. Avant de partir, cherchez en ligne le « centro maree » de Venise pour les prévisions. Si une marée haute est annoncée, achetez une paire de bottes en caoutchouc sur place (on en vend partout). C’est indispensable pour ne pas avoir les pieds gelés et pouvoir explorer librement.

Pour se déplacer : Les vaporetti (bus fluviaux) sont souvent bondés. Prenez un pass pour plusieurs jours, c’est plus économique. Mais honnêtement, le plus souvent, le plus rapide est de marcher. N’ayez pas peur de vous perdre, c’est la meilleure façon de découvrir les trésors cachés de la ville.

Inspirations et idées

Quel masque choisir pour une première expérience ?

Tout dépend de l’anonymat que vous recherchez. Le Lupo (un simple demi-masque) est facile à porter et parfait pour manger et boire, mais il laisse votre expression visible. Pour une immersion complète, optez pour la Bauta. Ce masque blanc traditionnel, avec sa mâchoire carrée distinctive, couvre tout le visage et modifie même légèrement la voix, garantissant une discrétion absolue. C’était le masque de l’égalité citoyenne par excellence.

Saviez-vous que la fabrication d’un masque en papier mâché (la fameuse cartapesta) nécessite entre 8 et 15 jours de travail ?

Ce temps long n’est pas un luxe. Il inclut le moulage initial en argile, la superposition de nombreuses couches de papier et de colle, un séchage lent pour éviter les fissures, puis le travail minutieux de décoration à la main. C’est ce processus qui différencie une œuvre d’art d’un simple souvenir.

L’élégance vénitienne réside souvent dans la sobriété. Pour une silhouette authentique et confortable :

  • Un tabarro : ce long manteau noir ou sombre en laine est la pièce maîtresse. Il crée le mystère et vous protège du froid humide de février.
  • Un tricorne : le chapeau à trois cornes, porté sur ou sans perruque, complète la ligne historique.
  • Des gants en cuir blanc ou noir pour la touche finale.

Le secret ? L’attention est alors entièrement portée sur votre masque, qui devient le véritable protagoniste.

Point important : La tenue du masque. Un masque vénitien traditionnel n’est pas un accessoire que l’on tient par un bâton. Il se porte, attaché derrière la tête par des rubans de satin. Le porter ainsi change votre posture, votre regard, votre manière d’interagir avec le monde. C’est un engagement, pas une coquetterie. L’un est un déguisement, l’autre est une transformation.

Pour vivre une expérience moins touristique, échappez à la foule de la Place Saint-Marc en fin de journée. Plongez dans les ruelles des sestieri plus calmes comme Cannaregio ou Castello. Vous y découvrirez des campi (petites places) où les enfants du quartier jouent en costume, des musiciens amateurs partagent quelques notes et où l’on entend encore le dialecte vénitien. C’est là que bat le cœur populaire du Carnaval.

  • Il ne se déforme pas avec l’humidité.
  • Il se patine magnifiquement avec le temps.
  • Chaque pièce est unique, portant les marques de l’outil.

Le secret ? Le cuir. Moins courant que le papier mâché, le masque en cuir, hérité de la Commedia dell’arte, offre une alternative plus brute et organique. Des ateliers comme celui de Ca’ Macana perpétuent ce savoir-faire ancestral.

Oubliez un instant les costumes opulents et concentrez-vous sur les sons. Le Carnaval, c’est le bruit feutré des pas sur les pavés humides, le clapotis de l’eau qui répond aux échos d’un violon s’échappant d’une fenêtre de palazzo, le froissement d’une cape en velours dans une ruelle étroite. C’est une symphonie discrète qui se savoure les yeux fermés.

Option A – Le Bal Masqué Privé : Souvent organisé dans un palais historique, il requiert un costume d’époque complet (location possible chez des spécialistes comme l’Atelier Tiepolo) et un budget conséquent. L’expérience est féerique, un véritable voyage dans le temps.

Option B – La Fête de Rue Spontanée : Le vrai esprit du Carnaval. Costumé ou non, un simple masque suffit pour se joindre aux concerts impromptus et aux rassemblements sur les places. C’est gratuit, joyeux et authentique.

Un conseil pour conserver votre masque artisanal après le voyage :

  • Évitez de le stocker dans un endroit humide (cave) ou en plein soleil.
  • Dépoussiérez-le délicatement avec un pinceau doux et souple.
  • Ne le nettoyez jamais avec de l’eau ou des produits chimiques ; la peinture et le plâtre sont fragiles.
Sandrine Morel

Styliste Beauté & Adepte du Bien-être Naturel
Ses expertises : Coiffure créative, Soins naturels, Équilibre intérieur
Sandrine a commencé sa carrière dans les salons parisiens avant de s'orienter vers une approche plus naturelle de la beauté. Convaincue que le bien-être intérieur se reflète à l'extérieur, elle explore constamment de nouvelles techniques douces. Ses années d'expérience lui ont appris que chaque personne est unique et mérite des conseils personnalisés. Grande amatrice de yoga et de méditation, elle intègre ces pratiques dans sa vision holistique de la beauté. Son mantra : prendre soin de soi devrait être un plaisir, jamais une corvée.