Chaque année, c’est la même histoire. L’air devient plus vif, les feuilles s’embrasent, et une sorte d’urgence me saisit : il faut que je sorte mes carnets. Franchement, l’automne, c’est un défi. Sa lumière dorée est magnifique, mais elle ne dure jamais longtemps. Ses couleurs sont d’une richesse folle, mais elles peuvent vite tourner à la soupe brunâtre si on ne fait pas attention. Après des années à barbouiller du papier, que ce soit pour le boulot ou juste pour moi, cette saison reste ma plus grande source d’inspiration et mon challenge préféré.
On me demande souvent la recette secrète pour obtenir cette ambiance si particulière. La vérité ? Il n’y en a pas. En revanche, il y a une approche, une méthode qui commence bien avant de poser la pointe du crayon sur la feuille. Ça commence par l’observation. Alors oubliez les formules magiques, je vais plutôt vous partager mon carnet de route, mes astuces de terrain et les leçons que j’ai apprises (parfois en râlant un peu, je l’avoue).
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Étape 1 : Regarder, vraiment, avant de dessiner
Le plus grand piège de l’automne, c’est de croire qu’on le connaît par cœur. On pense savoir à quoi ressemble une feuille morte. En réalité, notre cerveau est un grand fainéant : il nous sert une version simplifiée, un peu comme un emoji. Une feuille ? Orange. Un tronc ? Marron. Point.
Mon tout premier conseil est donc d’une simplicité désarmante : asseyez-vous et regardez. Juste dix minutes. Avant de me lancer dans une série, je peux passer des heures en forêt, à ne rien faire d’autre que m’imprégner. Je touche l’écorce humide d’un chêne, je sens l’odeur de champignon de la terre après une averse… Ces détails, ce sont eux qui vont donner une âme à votre dessin, bien plus qu’une technique parfaite.
Petite astuce d’atelier : Tenez un petit carnet de « références naturelles ». Ramassez une feuille, un marron. À côté, essayez de recréer la couleur exacte avec vos outils. Notez où vous l’avez trouvée. Ce petit travail d’archiviste va construire votre bibliothèque mentale de couleurs et de textures. C’est bien plus efficace qu’une photo Pinterest !
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Le matériel : Des choix intelligents, pas forcément chers
Soyons clairs : le meilleur matos du monde ne vous transformera pas en génie du dessin. Par contre, un matériel inadapté peut plomber la motivation. L’idée n’est pas de vider son compte en banque, mais de choisir ses outils avec intention.
Le papier, votre terrain de jeu
C’est LE choix crucial. Pour l’aquarelle, par exemple, une erreur de débutant est de prendre un papier trop fin. En dessous de 300g/m², il va gondoler dès la première goutte d’eau, et votre séance de détente va se transformer en combat. Croyez-moi, j’ai gaspillé assez de feuilles comme ça pour vous le garantir.
On trouve principalement trois textures de papier :
Le pressé à chaud : Il est tout lisse. Super pour les dessins fins à l’encre ou au crayon, mais l’aquarelle peut y paraître un peu fade.
Le pressé à froid : C’est le plus polyvalent, avec une texture légère qui accroche bien les pigments. Franchement, c’est celui que j’utilise 90% du temps. Il pardonne beaucoup.
Le grain torchon : Très texturé, il est génial pour des paysages avec beaucoup de matière, mais un cauchemar pour les petits détails.
Question budget : Pas besoin de vous ruiner au début ! Un bloc de papier d’étude de bonne qualité se trouve entre 10€ et 15€ dans les magasins de loisirs créatifs. Quand vous vous sentirez plus à l’aise, investir dans un bloc de marque professionnelle (autour de 25-40€) vous changera la vie, c’est promis.
Les couleurs : La qualité avant la quantité
Laissez tomber les grosses boîtes de 48 demi-godets d’aquarelle à bas prix. Leurs pigments sont souvent faibles et les mélanges deviennent vite ternes. Mieux vaut investir dans 6 à 8 couleurs de qualité professionnelle. Vos mélanges seront infiniment plus lumineux.
Ma palette d’automne de base, c’est ça :
Terre de Sienne brûlée : Un marron-rouge chaud, indispensable.
Ocre jaune : La base pour la lumière dorée.
Un beau rouge vif (type Pyrrole) : Pour les éclats sur les feuilles d’érable.
Un jaune éclatant (type Hansa) : Pour accrocher la lumière.
Bleu outremer : Pour les ombres froides et les ciels. Mélangé à la Terre de Sienne, il donne des gris neutres superbes.
Vert de vessie : Pour les touches de mousse ou les dernières feuilles qui résistent.
Astuce SOS « J’ai que du matos bas de gamme » : Pas de panique ! Si vous avez une palette d’entrée de gamme, évitez les mélanges complexes qui virent vite au gris sale. Privilégiez les couleurs pures de la boîte et utilisez moins d’eau pour garder un maximum d’intensité. C’est tout à fait possible de faire de jolies choses avec !
Quelques techniques pour passer au niveau supérieur
Ok, on a le matos. Maintenant, comment on s’en sert pour capturer cette fameuse lumière d’automne ?
La magie du « mouillé sur mouillé »
C’est LA technique pour des ciels doux et des arrière-plans flous. Le principe ? On peint sur du papier déjà humide.
Avec un gros pinceau propre, humidifiez la zone du ciel. Le papier doit briller, mais sans flaque.
Préparez vos couleurs, par exemple un Ocre jaune et un peu de Bleu outremer.
Déposez le jaune en haut, le bleu en bas, et regardez-les fusionner.
Le secret du pro : Ne touchez plus à rien ! Laissez l’eau et le papier faire le job. Plus on trifouille, plus on risque de créer de la boue. La patience est votre meilleure alliée.
Créer de la texture : écorce et tapis de feuilles
Pour l’écorce d’un arbre, essayez la technique du pinceau sec. Rincez votre pinceau, essorez-le bien, prélevez un peu de pigment épais et frottez-le sur le papier sec. La texture du papier fera le reste, c’est magique. Pour un tapis de feuilles, amusez-vous ! Faites des éclaboussures, des touches de pinceau sec, et variez les couleurs. C’est le chaos organisé qui rend la scène crédible.
Sujets d’automne décortiqués
Plutôt qu’une copie bête et méchante, voyons comment « construire » quelques classiques.
La feuille d’érable : Pensez squelette !
Ne commencez jamais par le contour. C’est le meilleur moyen d’obtenir une forme bancale. Pensez en 3 étapes : d’abord la nervure centrale, puis les grandes nervures qui partent de cet axe, et enfin, reliez les pointes pour dessiner le contour. Ça change tout ! Pour la couleur, partez du plus clair (le jaune), et quand c’est encore humide, ajoutez des touches d’orange ou de rouge. Laissez fuser.
La citrouille : Un super exercice de volume
Imaginez d’où vient la lumière. La face qui lui est exposée sera très claire (laissez presque le blanc du papier). Les côtés de chaque quartier seront d’un orange plus dense. Et les creux entre les quartiers seront les plus sombres. Pour ces ombres, oubliez le noir ! Un mélange de votre orange avec une pointe de bleu créera une ombre colorée bien plus vivante. Comptez une petite heure pour cet exercice si vous débutez, le temps de bien sentir les volumes.
Au-delà de la technique : Raconter une histoire
Un dessin réussi techniquement, c’est bien. Un dessin qui raconte quelque chose, c’est mieux. Pensez à votre composition. Ne centrez pas toujours votre sujet. Un chemin qui se perd au loin, une tasse de thé fumante sur un rebord de fenêtre… Ces petits détails suggèrent une histoire et invitent le spectateur dans votre monde. C’est là que l’art commence.
Le mot de la fin (et quelques rappels importants)
Créer doit rester un plaisir. Alors, pensez à votre dos et à votre cou ! Faites des pauses, étirez-vous. Un bon éclairage est aussi essentiel pour ne pas s’abîmer les yeux.
Attention aussi aux pigments ! Certains, notamment ceux à base de cadmium, sont magnifiques mais peuvent être toxiques. Ne léchez jamais vos pinceaux (oui, ça arrive !) et lavez-vous bien les mains. Si vous avez des enfants ou des animaux, privilégiez les couleurs modernes qui portent la mention « hue », elles sont bien plus sûres.
Voyez tous ces conseils comme une boîte à outils. Piochez dedans, testez, mélangez, et surtout, n’ayez pas peur de rater. Chaque feuille gâchée est une leçon apprise. C’est en faisant des erreurs qu’on progresse le plus vite.
Et maintenant ? À vous de jouer. L’automne n’attend que vous et votre carnet.
Galerie d’inspiration
Ne tombez pas dans le piège du marron tout fait en tube. Le secret d’une boue de feuilles mortes ou d’une écorce vivante réside dans le mélange. Essayez d’associer un Bleu Outremer avec une Terre de Sienne Brûlée. En variant les proportions, vous obtiendrez une gamme infinie de marrons, du plus chaud au plus froid, bien plus riches qu’une couleur pure.
Le saviez-vous ? La couleur jaune-orangé des feuilles d’automne a toujours été présente dans la feuille, masquée par la chlorophylle verte. C’est la disparition de cette dernière qui révèle les caroténoïdes.
Pensez-y en dessinant : votre vert d’été ne s’efface pas, il laisse place à une couleur qui était là, en attente. Cela peut influencer votre manière de superposer les couches de couleur, en laissant transparaître des touches de vert ou de jaune sous vos ocres.
Comment donner de la vie à un ciel d’automne, souvent gris et uniforme ?
Oubliez le gris de Payne pur. Créez des ciels plus subtils en mélangeant des couleurs complémentaires : un peu d’orange dans du bleu, une touche de violet dans du jaune. Appliquez ce lavis sur papier humide et laissez les pigments se diffuser. Pour une touche de lumière, une fois sec, soulevez délicatement un peu de couleur avec un pinceau propre et humide pour recréer une percée de soleil.
Pour vos croquis en extérieur :
Un carnet à papier mixte, format A5, comme le Canson XL Mix-Media.
Un stylo-plume Lamy Safari avec une encre waterproof brun foncé (ex: De Atramentis Document Ink).
Une petite boîte d’aquarelles de voyage, type Winsor & Newton Cotman Sketchers’ Pocket Box.
Un pinceau à réservoir d’eau Pentel Aquash Brush.
Papier pressé à froid (Cold Press) : Sa surface légèrement texturée est parfaite pour les lavis d’aquarelle. Elle accroche le pigment et donne un rendu vibrant, idéal pour les paysages forestiers.
Papier satiné (Hot Press) : Sa surface lisse est un régal pour le dessin au crayon ou au feutre fin. Il permet une grande précision, parfaite pour détailler les nervures d’une feuille ou la texture d’un champignon.
Pour l’automne, le papier Arches pressé à froid reste un standard de qualité inégalé pour sa capacité à supporter de multiples couches d’humidité.
L’un des détails qui ancre une scène dans la réalité automnale est la buée. Sur une vitre de café, sur des lunettes… Pour la recréer, travaillez sur papier teinté (gris ou beige). Dessinez la scène normalement, puis utilisez un crayon blanc Polychromos de Faber-Castell ou une craie pastel blanche pour estomper doucement les zones embuées. L’effet est instantané et poétique.
Une lumière rasante qui sculpte les formes.
Des reflets intenses sur les flaques d’eau.
Des silhouettes qui se détachent sur un fond brumeux.
Le secret ? La fameuse
L’erreur classique : Dessiner chaque feuille d’un arbre. C’est épuisant et le résultat est souvent décevant et rigide.
L’approche pro : Pensez en masses de couleurs. Esquissez la forme générale du feuillage, puis appliquez des taches de jaune, d’orange et de rouge avec un gros pinceau ou le plat d’une mine. Ne détaillez que quelques feuilles au premier plan pour donner l’illusion de la multitude.
Pour capturer la texture d’une écorce ou le grain d’une route mouillée, essayez la technique du frottage. Placez une feuille de papier fin sur la surface et frottez délicatement avec la tranche d’un crayon graphite ou d’un pastel sec. Vous pouvez ensuite intégrer cette texture authentique dans votre composition finale, soit en la scannant, soit en la découpant pour un collage.
85% des artistes amateurs ont tendance à utiliser du noir pur pour les ombres, ce qui ternit et
Un carnet qui se gondole sous l’aquarelle, ça vous dit quelque chose ?
Le grammage du papier est crucial. Pour l’aquarelle, ne descendez jamais en dessous de 300g/m². Un papier plus léger, même s’il est étiqueté
Un outil sous-estimé : le stylo gel blanc. Indispensable pour la touche finale. Une fois vos couleurs sèches, un Sakura Gelly Roll blanc vous permettra de rajouter une étincelle dans un œil de renard, le reflet sur une goutte de rosée ou la fine brume sur une toile d’araignée. C’est ce petit détail qui fait passer un dessin de
Sortez des sentiers battus. L’automne, ce n’est pas que les feuilles mortes.
Dessinez les étals de marché avec leurs courges aux formes étranges et leurs couleurs profondes.
Croquez la fumée qui s’échappe d’une tasse de thé posée sur un rebord de fenêtre.
Capturez la silhouette d’un parapluie se reflétant sur un trottoir luisant de pluie.
Les pigments d’aquarelle dits
Pour un effet de brume matinale ou de brouillard, la technique du
Crayons aquarellables : La précision du dessin, la liberté de la peinture. Dessinez les détails (nervures de feuille, briques d’un mur) puis passez un pinceau humide dessus pour transformer le trait en lavis. Les gammes Albrecht Dürer de Faber-Castell ou Museum Aquarelle de Caran d’Ache offrent des pigments intenses et résistants à la lumière.
Il permet de superposer des couleurs claires sur des couleurs foncées.
Il offre un rendu mat et velouté, parfait pour l’ambiance cosy de la saison.
Il sèche rapidement, ce qui est un atout pour le dessin en extérieur.
Le secret ? C’est la gouache ! Pensez à la gamme Himi Miya, avec ses godets pratiques et ses couleurs vibrantes, idéale pour redécouvrir le plaisir de la peinture opaque.
Comment dessiner la pluie sans surcharger votre illustration ?
N’essayez pas de dessiner chaque goutte. Suggérez-la. Travaillez sur les conséquences : les cercles concentriques dans une flaque, les couleurs qui fusionnent sur le sol mouillé, les lignes de fuite des gouttes sur une vitre. Pour un effet rapide, après avoir posé vos couleurs, projetez quelques gouttes d’eau claire sur le papier. En séchant, elles laisseront des auréoles subtiles.
Le défi du rouge : Le rouge automnal d’un érable du Japon est intense mais délicat. Évitez les rouges primaires trop criards. Votre meilleur allié est souvent un Rouge de Cadmium mélangé à une pointe de Jaune de Cadmium ou, pour le refroidir, à une touche de Rose Permanent. Testez vos mélanges avant de les appliquer.
Le papier teinté, ou
Budget serré ? Ne sacrifiez pas la qualité du papier, mais soyez malin sur les couleurs. Nul besoin d’acheter 36 tubes. Une palette limitée de 6 à 8 couleurs de qualité professionnelle (ex: Winsor & Newton Professional) vous donnera des résultats bien plus beaux que 24 couleurs d’une gamme étude. Apprendre à mélanger est la compétence la plus économique et la plus précieuse.
Les feutres fins calibrés, comme les Pigma Micron de Sakura, sont parfaits pour ajouter des détails nets sur une aquarelle sèche. Choisissez une encre sépia ou brune plutôt que noire pour conserver la chaleur de la palette automnale. Un trait en 01 pour les détails fins, un 05 pour les contours plus marqués.
Tatoueuse & Artiste Peintre Spécialités : Tatouages botaniques, Aquarelle sur peau, Art corporel délicat
Laurena partage son temps entre L'Encre Mécanique à Lyon et Bleu Noir à Paris, deux temples du tatouage français. Formée aux beaux-arts avant de tomber amoureuse de l'aiguille, elle fusionne peinture et tatouage dans un style unique. Ses créations florales semblent danser sur la peau comme des aquarelles vivantes. Quand elle ne tatoue pas, elle expose ses toiles dans des galeries underground et partage ses inspirations artistiques avec sa communauté.