Planter un Figuier : Le Guide Complet pour une Récolte Abondante (Même au Nord !)
J’ai vu tellement de gens planter un figuier avec des étoiles dans les yeux, pour au final n’avoir que de jolies feuilles… C’est frustrant ! Et franchement, l’erreur est presque toujours la même : un mauvais choix de variété pour leur région. Le figuier, ce n’est pourtant pas un arbre compliqué, mais il a ses petites manies. Si on les ignore, on est déçu. Si on les comprend, il vous le rendra au centuple.
Contenu de la page
- Avant de choisir, comprendre la bête
- Unifère ou bifère : le choix qui change tout pour votre récolte
- Ma sélection de variétés testées et approuvées par région
- La plantation : les gestes qui sauvent
- Protéger son jeune figuier en hiver : le tuto facile
- La taille : moins on en fait, mieux c’est (ou presque)
- Les petits soucis du quotidien
- le fruit de la patience
Mon but ici, ce n’est pas de vous noyer sous une liste de noms barbares. C’est de vous donner le mode d’emploi pratique, celui qu’on apprend les mains dans la terre, pour que votre figuier devienne une vraie machine à délices pour les décennies à venir.
Avant de choisir, comprendre la bête
Avant même de penser à une variété, il y a deux ou trois trucs à savoir sur le fonctionnement de cet arbre. C’est la base pour ne pas faire de bêtise, croyez-moi.

Le soleil, c’est non négociable
Le figuier est un enfant du soleil, un vrai Méditerranéen dans l’âme. Pour avoir des fruits bien sucrés, il lui faut un maximum de lumière et de chaleur. C’est aussi simple que ça. Un figuier à l’ombre vous donnera du bois et des feuilles, point barre. L’emplacement, c’est donc 50% de la réussite.
D’ailleurs, la chaleur ne sert pas qu’à mûrir les fruits. Un figuier calé contre un mur exposé plein sud, c’est le jackpot. La pierre emmagasine la chaleur la journée et la relâche la nuit, créant un microclimat qui peut sauver vos récoltes dans une région un peu fraîche.
Le secret des fruits : pourquoi « autofertile » est le mot magique
Dans la nature, la reproduction du figuier est une histoire super complexe qui dépend d’un tout petit insecte, le blastophage, qu’on ne trouve que dans le sud de la France. Heureusement pour nous, la plupart des figuiers qu’on achète sont « parthénocarpiques ».

C’est un mot savant pour dire une chose toute simple : ils font des fruits tout seuls, sans avoir besoin d’être pollinisés. On les appelle des variétés autofertiles. Si vous habitez au nord de la Loire, ce n’est pas une option, c’est une OBLIGATION. Sinon, vous n’aurez jamais la moindre figue. Quand vous achetez votre arbre, vérifiez bien que cette mention figure sur l’étiquette. Un doute ? Demandez au pépiniériste, un pro saura vous répondre.
La résistance au froid : méfiez-vous des chiffres !
On lit partout qu’un figuier résiste à -15°C. C’est vrai et faux. Cette température, c’est pour un arbre adulte, bien installé depuis des années, dans un sol sec et à l’abri du vent. Un jeune plant, lui, est bien plus fragile. Un -10°C avec un vent glacial et humide peut lui être fatal, alors qu’il supportera un -15°C sec et bref. J’ai appris à mes dépens qu’un figuier planté dans un couloir venteux, même avec un hiver doux, peut voir ses rameaux grillés par le vent. La rusticité, ce n’est pas qu’un chiffre, c’est un ensemble de conditions.

Unifère ou bifère : le choix qui change tout pour votre récolte
Là, on touche au point technique le plus important. C’est ce qui va déterminer si vous aurez des figues une ou deux fois par an. Il y a deux équipes :
Les unifères : la valeur sûre pour les climats frais
Un figuier « unifère » ne produit qu’une seule fois par an, à la fin de l’été (août à octobre). Ces figues, qu’on appelle figues d’automne, poussent sur le bois de l’année, c’est-à-dire sur les nouvelles branches qui sont apparues depuis le printemps.
L’avantage énorme ? Même si l’arbre a un peu gelé en hiver, il va faire de nouvelles pousses au printemps qui porteront des fruits. C’est pour ça que ce sont les variétés les plus fiables et recommandées au nord de la Loire et en montagne.
Les bifères : la double ration pour les climats doux
Un figuier « bifère », lui, peut produire deux fois par an. C’est la promesse de l’abondance, mais attention, il y a des règles.

- La première récolte (figues-fleurs) : Elles arrivent en début d’été (juin-juillet) et sont souvent plus grosses. Le truc crucial à comprendre, c’est qu’elles poussent sur le bois de l’année précédente.
- La deuxième récolte (figues d’automne) : Comme pour les unifères, elles poussent sur le bois de l’année.
Vous voyez le piège ? Dans une région froide, si un bon gel (-10°C) abîme les rameaux pendant l’hiver, adieu la récolte de figues-fleurs ! Pour mes clients du nord, je dis toujours de voir une variété bifère comme une unifère avec un bonus aléatoire. Par contre, dans le sud ou sur la côte atlantique, c’est le bonheur.
Ma sélection de variétés testées et approuvées par région
Un jardin bien abrité à Lille peut être plus clément qu’un coteau venteux en Ardèche. Voici des choix qui ont fait leurs preuves sur le terrain, pas juste sur le papier.
Zone méditerranéenne (Sud-Est, Corse)
Ici, c’est le paradis du figuier, on peut se concentrer sur le goût !

- ‘Noire de Caromb’ (unifère) : Une merveille pour le séchage. Chair dense, très sucrée. Une vraie figue de connaisseur qui adore le soleil brûlant.
- ‘Col de Dame’ (unifère) : Une figue tardive (septembre-octobre) à la chair très fine. Il lui faut un automne long et ensoleillé pour être parfaite.
- ‘Marseillaise’ (bifère) : Une valeur sûre, super productive. De petites figues-fleurs jaunes délicieuses et une grosse récolte d’automne. Top pour les confitures et s’adapte très bien en pot.
- ‘Solliès’ ou ‘Bourjassotte Noire’ (unifère) : La fameuse figue AOP. Grosse, violette, un goût parfaitement équilibré. C’est LA figue fraîche par excellence.
Zone océanique (Côte Atlantique, Sud-Ouest)
Ici, on cherche des variétés qui supportent un peu d’humidité et qui sont assez précoces.
- ‘Goutte d’Or’ (bifère) : Un classique indémodable et un excellent choix pour cette zone. Ses figues-fleurs sont grosses, dorées et juteuses. La récolte d’automne est quasi assurée.
- ‘Ronde de Bordeaux’ (unifère) : Très précoce pour une unifère, elle mûrit dès la mi-août. Petite figue noire au parfum puissant, certains y trouvent des notes de cassis. Son atout : elle résiste bien à l’humidité et n’éclate pas.
- ‘Madeleine des Deux Saisons’ (bifère) : Très généreuse, surtout en figues-fleurs qui arrivent très tôt en juillet. Elle est parfaite pour les étés qui ne sont pas caniculaires.

Zones continentales et froides (Nord, Est, Centre, Montagne)
Le choix est plus stratégique. On vise la rusticité, la précocité et, bien sûr, l’autofertilité.
- ‘Pastilière’ (unifère) : Pour moi, c’est le meilleur choix en climat frais. Très rustique, et surtout, elle n’a pas besoin d’une chaleur intense pour donner des fruits délicieux, à la pulpe rouge et fondante. Fiable et savoureuse.
- ‘Dalmatie’ (bifère) : Une variété étonnante. Elle est assez rustique pour donner, contre un mur bien exposé, une petite récolte de figues-fleurs même au nord de la Loire. Ses fruits sont énormes et son « œil » (le petit trou sous la figue) bien fermé empêche la pluie de la faire pourrir. Un détail qui compte !
- ‘Brown Turkey’ (bifère) : Une force de la nature, hyper adaptable et très rustique. Même après un gel sévère, elle repart de la base. Ce n’est peut-être pas la plus raffinée en goût, mais c’est l’assurance d’avoir une récolte. C’est le figuier que je conseille aux débutants en climat difficile.
La plantation : les gestes qui sauvent
Avoir le bon arbre, c’est bien. Le planter correctement, c’est mieux. C’est un investissement pour les 50 prochaines années !
Votre kit de démarrage
Avant de creuser, assurez-vous d’avoir tout sous la main :
- Le figuier : Comptez entre 25€ et 60€ pour un bel arbre en pépinière spécialisée. L’avantage de la pépinière sur la grande surface, c’est le conseil !
- Drainage : Un sac de graviers ou de pouzzolane (environ 10-15€).
- Amendement : Un sac de bon compost bien mûr (pas de fumier frais !).
- Un tuteur et des liens : Pour le maintenir droit la première année.
- Équipement de sécurité : Des gants à manches longues et des lunettes. On verra pourquoi c’est VITAL un peu plus loin.
L’emplacement et la préparation du sol
Choisissez l’endroit le plus ensoleillé et chaud du jardin, idéalement contre un mur au sud ou sud-ouest. Laissez au moins 1,5 mètre entre l’arbre et les fondations de la maison, ses racines sont puissantes.
Le figuier a une sainte horreur : avoir les pieds dans l’eau en hiver. C’est la cause numéro un de mortalité.
Astuce pour les nuls : Un doute sur votre sol ? Faites ce test tout simple. Creusez un trou de 30 cm de profondeur et remplissez-le d’eau. Si l’eau a disparu en moins de 10-12 heures, c’est bon. Si elle stagne encore le lendemain, le drainage est indispensable.
Ma méthode est simple : je creuse un trou d’au moins 80 cm en tous sens. Au fond, je mets une couche de 20 cm de drainage (gravats, tuiles cassées, graviers). Ensuite, je prépare un mélange avec la terre du jardin, du compost, et si la terre est lourde, un seau de 10L de sable de rivière pour alléger le tout.
L’option maligne : la culture en pot
C’est une excellente solution, surtout avec des variétés comme ‘Dalmatie’ ou ‘Marseillaise’.
- Le pot : Commencez avec un pot de 30-40 litres, pas plus. Le figuier aime être un peu à l’étroit pour fructifier. Vous rempoterez tous les 3-4 ans dans un pot d’environ 10 cm de diamètre supérieur.
- Le substrat : Mon mélange gagnant : 1/3 de bonne terre de jardin, 1/3 de terreau de plantation, et 1/3 de drainant (pouzzolane, perlite).
- L’hivernage : C’est la seule contrainte. En climat froid, le pot doit être rentré dans un garage, une cave ou une serre froide (entre 0 et 8°C). Un micro-arrosage une fois par mois suffit.
Protéger son jeune figuier en hiver : le tuto facile
Les deux ou trois premiers hivers sont critiques. Protéger votre jeune arbre est une assurance-vie pour sa future production. C’est très simple :
- Après la chute des feuilles, paillez généreusement le pied avec une couche de 20-30 cm de feuilles mortes, de paille ou de fougères sèches.
- En cas de grand froid annoncé (-5°C et moins), enveloppez les branches avec une ou deux couches de voile d’hivernage. Ne le serrez pas trop.
- Retirez le voile dès que les grosses gelées sont passées (fin février, mars selon les régions) pour éviter que l’arbre ne « transpire » et pourrisse.
La taille : moins on en fait, mieux c’est (ou presque)
Beaucoup de gens ont peur de tailler, pourtant c’est facile si on a compris la différence unifère/bifère.
- Pour un unifère : La taille est minimale. En fin d’hiver, contentez-vous d’enlever le bois mort et les branches qui se croisent au centre pour laisser entrer la lumière. C’est tout !
- Pour un bifère : C’est là qu’il ne faut pas se tromper. En fin d’hiver, ne touchez SURTOUT PAS aux rameaux de l’an dernier qui semblent sains, même s’ils sont nus ! C’est sur eux que pousseront les figues-fleurs. Ne taillez que ce qui a visiblement gelé (bois sec, cassant, foncé). J’ai vu un apprenti zélé tailler un bifère à ras en mars… Résultat : un arbre magnifique, mais pas une seule figue-fleur de l’été. La leçon a été retenue !
Les petits soucis du quotidien
Un figuier bien installé est un arbre tranquille. Mais quelques signaux doivent vous alerter.
Mes figues tombent avant d’être mûres ? C’est souvent un coup de stress dû à l’arrosage. De longues périodes de sécheresse suivies d’un arrosage massif font tomber les fruits. Mieux vaut un arrosage régulier en été. Ça peut aussi arriver sur un arbre très jeune qui n’a pas encore la force de tout mener à terme.
Mon figuier ne fait pas de fruits ? Plusieurs pistes : manque de soleil, variété non autofertile au mauvais endroit, taille trop sévère… ou simplement sa jeunesse. Un figuier met 2 à 3 ans pour vraiment commencer à produire. Patience !
ATTENTION ! UN CONSEIL DE SÉCURITÉ VITAL
La sève blanche du figuier (le latex) est très irritante et photosensibilisante. Si vous en avez sur la peau, lavez immédiatement et surtout, NE VOUS EXPOSEZ PAS AU SOLEIL pendant 48h. Vous risquez de vraies brûlures. Je ne plaisante pas. Quand je taille, c’est manches longues, gants et lunettes. C’est une précaution que trop peu de gens connaissent et qui peut vous éviter un très mauvais moment.
le fruit de la patience
Planter un figuier, c’est un projet à long terme. La plus grande erreur, c’est l’impatience. Le succès repose sur trois piliers : la bonne variété pour votre climat, le meilleur emplacement possible, et un peu de patience les premières années. Avec ces conseils, j’espère de tout cœur vous avoir donné les clés pour que, chez vous aussi, la promesse de figues gorgées de soleil soit tenue.