Votre laurier a des trous ? Le guide complet pour sauver votre haie (sans paniquer)
Ah, la fameuse haie de laurier-palme… On la plante partout pour avoir un beau mur de verdure toute l’année. C’est un classique. Et comme beaucoup de jardiniers, j’en ai planté des kilomètres au fil de ma carrière. Du coup, je la connais par cœur : ses petites manies, ce qu’elle aime, et surtout, ce qui la met K.O.
Contenu de la page
Quand un client m’appelle, la voix un peu affolée, parce que sa haie a des feuilles jaunes pleines de trous, je sais déjà à 90% ce que je vais trouver. Beaucoup pensent à l’oïdium, mais c’est rarement le cas. Le vrai coupable, c’est une maladie bien plus sournoise : la criblure.
Mon but ici n’est pas de vous noyer sous des termes techniques, mais de vous donner les clés pour comprendre et agir comme un pro. Une belle haie, dense et saine, ce n’est pas de la sorcellerie. C’est juste une suite de bonnes décisions, prises au bon moment. Allez, on retrousse nos manches !

1. Criblure ou Oïdium ? L’erreur à ne plus faire
La première étape, c’est de ne pas se tromper de diagnostic. Franchement, c’est la base. Car si vous traitez pour la mauvaise maladie, vous perdez du temps, de l’argent, et vous pulvérisez des produits pour rien. C’est l’erreur la plus fréquente que je vois.
La criblure : l’ennemi n°1 du laurier
C’est elle, la grande responsable des haies qui ont l’air d’avoir été mitraillées. On l’appelle d’ailleurs la « maladie du coup de fusil », et vous allez vite comprendre pourquoi.
Au début, souvent au printemps, vous verrez apparaître de petites taches rondes sur les jeunes feuilles, d’un brun-rougeâtre assez caractéristique. Ensuite, le centre de ces taches sèche et devient beige. Et puis, un jour, cette partie morte tombe, laissant un trou bien net, comme si on avait tiré un plomb dedans. Quand l’attaque est sévère, le feuillage est littéralement criblé, déchiqueté. Les feuilles les plus touchées jaunissent et tombent.

Son carburant ? L’humidité. Un printemps pluvieux et frais, et c’est la fête pour le champignon responsable. D’ailleurs, les éclaboussures de pluie propagent les spores, c’est pourquoi les feuilles du bas sont souvent les premières à trinquer.
L’oïdium : un simple voile blanc
L’oïdium, lui, est beaucoup plus facile à reconnaître. Imaginez un léger feutrage blanc ou gris, un peu comme de la farine, qui apparaît sur les feuilles. Vous pouvez même l’essuyer avec le doigt. Ça peut faire gondoler les feuilles, mais jamais, au grand jamais, ça ne fera de trous. C’est la différence fondamentale !
Bon à savoir : Les traitements ne sont pas les mêmes. Le soufre, efficace contre l’oïdium, est quasi inutile contre la criblure. À l’inverse, la bouillie bordelaise (à base de cuivre) fonctionne contre la criblure. Vous voyez pourquoi il est crucial de ne pas les confondre ?
2. La prévention : 80% du travail est fait ici !
Je le dis et le répète sur tous mes chantiers : mieux vaut prévenir que guérir. Une haie plantée dans les règles de l’art est une haie qui vous demandera beaucoup moins de travail par la suite.

- Espacez vos plants ! Je sais, on est pressé d’être à l’abri des regards. Mais planter trop serré (à moins de 80 cm), c’est la garantie d’une mauvaise circulation de l’air. Laissez au moins 80 cm, voire 1 mètre entre chaque plant. L’air qui circule est le pire cauchemar des champignons.
- Soignez le sol. Le laurier déteste avoir les pieds dans l’eau. Si votre terre est argileuse et compacte, améliorez-la ! Incorporez du compost, du terreau et un peu de sable de rivière dans la tranchée de plantation pour assurer un bon drainage.
- Arrosez au pied, jamais sur les feuilles. C’est la règle d’or. Utilisez un goutte-à-goutte ou arrosez doucement à la base. Si vous devez absolument utiliser un arroseur, faites-le le matin pour que le soleil sèche le feuillage rapidement. Un feuillage humide la nuit, c’est un hôtel 5 étoiles pour les maladies.
3. La taille : plus qu’un simple coup de ciseaux
Une bonne taille est un acte sanitaire. Prenez l’habitude de désinfecter vos outils (sécateur, taille-haie) avec de l’alcool à 70° ou de l’eau de Javel diluée avant de commencer. Surtout si vous passez d’une haie à une autre.

Le meilleur moment pour une taille d’assainissement est à la fin de l’hiver (février-mars), avant que la nature ne se réveille. Profitez-en pour aérer le cœur de l’arbuste, enlevez les branches qui se croisent et celles qui sont très abîmées. Et surtout, ne laissez jamais les déchets de taille au sol !
Laissez-moi vous raconter une de mes premières bourdes de jeune paysagiste : j’avais taillé une haie bien malade et, par paresse, j’ai laissé une partie des feuilles au pied. Grosse erreur ! Le printemps suivant, la maladie était revenue en force. Une leçon que je n’ai jamais oubliée. Ramassez tout et jetez-le à la déchetterie, ne le mettez surtout pas au compost !
4. Les traitements : quand il faut vraiment intervenir
Parfois, même avec la meilleure volonté du monde, la maladie s’installe. Pas de panique, on va agir avec méthode.
Action immédiate : le défi des 15 minutes !
Vous voyez les premières feuilles trouées ? Allez, top chrono : prenez un sécateur et un sac-poubelle. En 15 minutes, faites le tour de votre haie et coupez toutes les feuilles et petites tiges visiblement atteintes. C’est simple, rapide, et c’est déjà une énorme bataille de gagnée.

Les solutions douces (pour une attaque limitée)
On entend beaucoup de choses sur les remèdes de grand-mère. Soyons honnêtes, leur efficacité est limitée sur la criblure.
Le plus crédible reste le bicarbonate de soude. Il change le pH de la feuille et gêne le champignon. Ma petite recette : 1 cuillère à café (environ 5g) de bicarbonate dans 1 litre d’eau, avec une cuillère à soupe de savon noir liquide pour que ça colle bien. À pulvériser toutes les deux semaines par temps humide, surtout en prévention.
La décoction de prêle est aussi intéressante. C’est plus un fortifiant qu’un traitement. Elle rend la plante plus robuste. Un bon coup de pouce au printemps !
Le traitement de fond : la bouillie bordelaise
Si la maladie est bien là ou que vous êtes dans une région très humide, il faut parfois sortir l’artillerie. La bouillie bordelaise est le traitement traditionnel le plus efficace contre la criblure. On la trouve facilement dans toutes les jardineries (Castorama, Jardiland…) pour moins de 10€ le paquet, de quoi faire plusieurs années.

Attention, ce n’est pas un produit anodin. On l’utilise avec parcimonie. Le timing est essentiel :
- Un traitement à l’automne, après la chute des feuilles, pour nettoyer le bois des spores hivernantes.
- Un traitement au tout début du printemps, juste avant l’ouverture des bourgeons, pour protéger les jeunes pousses.
Pour le dosage, lisez l’étiquette, mais une bonne règle est d’utiliser la dose la plus faible (souvent autour de 5g/L) en prévention à l’automne, et une dose un peu plus forte (vers 10g/L) au printemps si l’attaque de l’année précédente était sévère. Pour l’application, un pulvérisateur de 5L (comptez entre 20€ et 40€) est parfait. Pensez à bien mouiller le dessus, le dessous des feuilles et les branches. Prévoyez une petite demi-heure pour traiter 20 mètres de haie tranquillement.
5. Les cas désespérés et les choix malins
La taille de rajeunissement : l’option radicale
Parfois, on hérite d’une haie qui n’a pas été entretenue depuis des lustres et qui est complètement dévastée. Dans ce cas, une solution radicale peut être la meilleure : la taille de rajeunissement.

En fin d’hiver, on coupe tout très court, à 30-40 cm du sol. Oui, ça fait peur. Pendant quelques mois, votre jardin semblera nu. Mais le laurier est incroyablement vigoureux. Dès le début de l’été, vous verrez repartir de nouvelles pousses saines et denses. C’est une remise à zéro qui, si elle est bien suivie (arrosage au pied, prévention), peut sauver votre haie pour de bon.
Le choix de la variété, ça change tout !
Si vous devez planter une nouvelle haie, sachez que tous les lauriers-palmes ne se valent pas face à la maladie. Le plus courant, le ‘Rotundifolia’ avec ses feuilles bien rondes, est aussi l’un des plus sensibles.
Parlez-en à votre pépiniériste ! Des variétés comme le ‘Caucasica’, avec ses feuilles plus longues et son port plus élancé, ou le ‘Genolia’, qui pousse en colonne et s’aère donc naturellement mieux, sont bien plus résistantes. Ce n’est pas une garantie à 100%, mais ça fait une vraie différence.

Quand appeler un pro ?
On peut faire beaucoup soi-même, mais il faut être réaliste. Si vous doutez du diagnostic, si votre haie fait 3 mètres de haut, ou si l’idée d’une taille radicale vous effraie, n’hésitez pas. Faire venir un paysagiste pour un diagnostic coûte généralement entre 60€ et 100€, mais ses conseils peuvent vous éviter des erreurs coûteuses et vous faire gagner des années.
En résumé, soigner une haie malade est un marathon, pas un sprint. La clé, c’est l’observation et la prévention. L’air, un sol qui respire et des gestes justes sont vos meilleurs alliés. Avec un peu de patience, vous retrouverez une haie magnifique, et ça, c’est la plus belle des récompenses pour un jardinier !
Galerie d’inspiration


Au-delà du traitement curatif, la prévention est votre meilleure alliée. Une haie de lauriers vigoureuse résiste bien mieux aux assauts des champignons. Adoptez ces trois réflexes simples pour mettre toutes les chances de votre côté :
- Aérez le feuillage : Une taille annuelle après la floraison, pas trop sévère, permet à l’air de circuler et au feuillage de sécher rapidement après la pluie, limitant ainsi la prolifération.
- Arrosez au pied : N’aspergez jamais le feuillage, surtout le soir. L’humidité stagnante est le terrain de jeu favori de la criblure. Un arrosage goutte-à-goutte est idéal.
- Faites le ménage : Ramassez et évacuez systématiquement les feuilles malades tombées au sol. Ne les mettez pas au compost, vous risqueriez de propager la maladie l’année suivante.
Saviez-vous que la bouillie bordelaise, ce traitement ancestral à la couleur bleue si reconnaissable, reste l’un des fongicides les plus efficaces contre la criblure et qu’elle est autorisée en agriculture biologique ?
Son action est préventive : le cuivre qu’elle contient empêche les spores du champignon de germer. Le secret est de l’appliquer au bon moment, sur un feuillage sec. Réalisez un premier traitement à l’automne, à la chute des feuilles, et un second à la fin de l’hiver, juste avant le démarrage de la végétation. Des marques comme Solabiol ou Neudorff proposent des formulations faciles à doser. C’est le geste bouclier par excellence pour protéger les jeunes pousses du printemps.