Votre citronnier fait la tête ? Le guide pour le ressusciter (et le greffer comme un pro)

Auteur Laurine Benoit

J’ai passé un paquet d’années les mains dans la terre, entre les serres et les vergers. Des citronniers, j’en ai vu défiler, croyez-moi ! Des spécimens magnifiques croulant sous les fruits, mais aussi, et trop souvent, des petits malheureux qui semblaient au bord du gouffre. Un citronnier qui perd toutes ses feuilles, ça fait mal au cœur, et franchement, ça fiche la trouille.

Le premier réflexe de beaucoup de gens ? La poubelle. Ils se disent : « C’est fini, il est mort. » Quelle erreur ! Si j’ai bien appris une chose, c’est qu’un arbre est un battant incroyable. Avant de baisser les bras, il faut juste apprendre à l’écouter. La chute des feuilles, c’est un appel à l’aide, pas une lettre de suicide.

Alors, oubliez les listes de conseils à la va-vite. Ici, on va faire les choses bien. D’abord, on va jouer les détectives pour comprendre ce qui cloche et sauver votre arbre. Ensuite, on passera à un sujet qui me fascine : la greffe. C’est un geste d’artisan, un peu magique, qui permet de créer le citronnier de vos rêves. Prêt ? On retrousse ses manches.

peut on greffer un citronnier au mois de mars citronnier sans feuilles sur rebord fenetre

Partie 1 : Diagnostiquer et sauver un citronnier en détresse

Un citronnier en pleine forme garde ses feuilles, c’est un arbre à feuillage persistant. Si le vôtre se déplume, c’est qu’il subit un stress énorme. La première étape n’est pas d’arroser à tout-va ou de tailler au hasard, mais bien de mener l’enquête.

L’enquête : à la recherche du coupable

Observez attentivement votre plante et son environnement. Neuf fois sur dix, le problème vient de l’arrosage, de la lumière, de la température ou d’un manque de nutriments. Parfois, des petites bêtes s’en mêlent.

Le problème n°1 : l’arrosage

C’est la cause la plus fréquente de mortalité. Et contrairement à ce qu’on pense, l’excès d’eau est bien plus dangereux que le manque. Des racines qui trempent en permanence, c’est l’asphyxie assurée. Elles pourrissent et ne peuvent plus nourrir l’arbre.

  • Le test infaillible : Enfoncez votre doigt dans la terre sur 3-4 cm. C’est humide ? Ne touchez à rien. C’est sec ? Alors là, oui, il est temps d’arroser. Simple, efficace.
  • Trop d’eau ? Les feuilles jaunissent, deviennent molles et tombent. Le terreau peut même sentir le moisi. C’est l’odeur caractéristique des racines qui pourrissent.
  • Pas assez d’eau ? Les feuilles s’enroulent sur elles-mêmes, sèchent, deviennent cassantes et tombent.

Petit conseil : L’eau du robinet est souvent très calcaire. À la longue, ça peut bloquer l’assimilation des nutriments. L’idéal, c’est l’eau de pluie. Sinon, une astuce simple consiste à laisser reposer votre eau d’arrosage dans un arrosoir pendant 24 heures avant de l’utiliser. Le calcaire se déposera au fond.

faire reprendre un citronnier qui a perdu ses feuilles jeune pousse de citronnier

Le choc thermique et lumineux

Le citronnier est une vraie diva : il déteste les changements brutaux. Le passage de votre terrasse à l’intérieur en automne est un moment critique. Il passe d’une lumière intense et d’une bonne aération à une ambiance plus sombre et sèche. C’est un choc terrible pour lui.

Placez-le toujours près de la fenêtre la plus ensoleillée de la maison, mais attention aux courants d’air froids qui peuvent provoquer une chute brutale des feuilles.

Les carences et les parasites

Un citronnier en pot est un gourmand. Il épuise vite les ressources de son terreau. Si ses feuilles jaunissent alors que les nervures restent bien vertes, c’est le signe classique d’une chlorose, un manque de fer souvent dû à un sol trop calcaire ou un excès d’eau.

Pensez aussi à inspecter votre arbre de très près. Sous les feuilles, le long des tiges… cherchez des intrus !

faire reprendre un citronnier qui a perdu ses feuilles citronnier aux fruits dans une cour devant maison
  • Les cochenilles : Ces petits amas blancs cotonneux ou ces petites carapaces brunes adorent les agrumes. Elles sucent la sève et affaiblissent la plante.
  • Les araignées rouges : Quasi invisibles à l’œil nu, on repère leurs méfaits aux minuscules toiles qu’elles tissent et à l’aspect grisâtre et poussiéreux que prennent les feuilles avant de tomber.

Bon à savoir : Pour vous débarrasser de ces parasites, pas besoin de sortir l’artillerie chimique. Préparez une solution maison : dans un litre d’eau, mélangez une cuillère à soupe de savon noir liquide et une cuillère à soupe d’huile végétale (colza, tournesol…). Vaporisez partout sur l’arbre, surtout sous les feuilles. Répétez l’opération une semaine plus tard. C’est redoutablement efficace.

Le moment de vérité : est-il encore en vie ?

Allez, on fait ça tout de suite ensemble. C’est le « quick win » de cet article. Prenez une branche de votre citronnier et, avec votre ongle, grattez tout doucement un petit bout d’écorce.

quelle période pour greffer un citronnier greffe en cuisson

C’est vert juste en dessous ? BRAVO ! Il est vivant ! La sève circule encore. Si c’est sec et brun, cette partie est morte. Testez à plusieurs endroits, en descendant vers le tronc.

Le plan de sauvetage étape par étape

Une fois le diagnostic posé, on passe à l’action, méthodiquement.

  1. Le grand nettoyage : Prenez un sécateur bien aiguisé et désinfecté (à l’alcool à 70°). Coupez tout le bois mort, sec et cassant. N’ayez pas peur, taillez jusqu’à retrouver du bois bien vert.
  2. Le rempotage d’urgence (si vous suspectez la pourriture des racines) : C’est une opération à cœur ouvert. Dépotez l’arbre. Retirez l’ancien terreau, coupez toutes les racines brunes, molles et nauséabondes. Ne gardez que les racines saines, fermes et blanches/crèmes. Préparez-lui un nouveau nid douillet : un pot à peine plus grand que le précédent avec de BONS trous de drainage. Côté budget, comptez 8-15€ pour un sac de terreau spécial agrumes de qualité, et 5-10€ pour des billes d’argile ou de la pouzzolane à mettre au fond pour un drainage parfait.
  3. L’effet « mini-serre » : Pour l’aider à refaire des feuilles, il lui faut une humidité d’hôpital ! Placez un grand sac en plastique transparent sur sa tête, maintenu par des tuteurs pour ne pas toucher les branches. Aérez 10 minutes par jour. C’est une technique de pro pour limiter son stress.
  4. La bonne place : Installez votre convalescent dans un endroit très lumineux, mais SANS soleil direct qui pourrait brûler ses branches nues.
  5. Arrosage et diète : Arrosez seulement quand la terre est sèche, et surtout, ne donnez AUCUN engrais ! Fertiliser un arbre sans feuilles, c’est comme essayer de faire manger un repas de fête à quelqu’un qui a une gastro. Ça ne sert à rien et ça peut même brûler les racines fragiles.

Attention, la patience est votre meilleure alliée. Un citronnier peut mettre plusieurs semaines, voire deux ou trois mois, avant de montrer les premiers signes de reprise. Ne baissez pas les bras !

quelle mois pour greffer un citronnier brindille aux bourgeons dans une main

Partie 2 : La greffe, l’art de créer le citronnier parfait

Sauver un arbre, c’est bien. Le rendre productif et délicieux, c’est encore mieux. C’est là que la greffe entre en scène. La plupart des citronniers que vous achetez dans le commerce sont greffés. Pourquoi ?

Le principe est tout simple

Un citronnier issu d’un simple pépin peut mettre une décennie, voire plus, à donner des fruits. Et rien ne garantit qu’ils seront bons ! La greffe, c’est un mariage de raison. On prend un « porte-greffe », la partie basse, choisi pour son système racinaire hyper robuste et sa résistance aux maladies ou au froid. Et on y soude un « greffon », un petit bout de branche prélevé sur un citronnier dont on adore les fruits.

Le secret, c’est de mettre en contact la fine couche verte qui se trouve juste sous l’écorce (le cambium) du porte-greffe et du greffon. C’est l’autoroute de la sève, et si la connexion se fait, la greffe prend.

un citronnier non greffe peut il donner des fruits main fait la greffegreffe

Préparation : les règles d’or

1. Le bon timing

On greffe quand l’arbre est en pleine croissance et que la sève circule bien. Les deux meilleures fenêtres sont le printemps (avril-mai) ou la fin de l’été (août-septembre). La greffe de fin d’été est souvent la plus simple pour les débutants ; le bourgeon « dort » tout l’hiver et démarre en force au printemps suivant.

2. L’outil indispensable : le greffoir

Oubliez le couteau de cuisine. Il vous faut un vrai greffoir. Sa lame est un rasoir. Franchement, c’est un petit investissement (entre 20€ et 50€ dans les bonnes jardineries ou en ligne) mais c’est pour la vie. Attention, c’est un outil très coupant ! Je me suis entaillé plus d’une fois au début… Travaillez toujours calmement, en éloignant la lame de votre corps. Et surtout, désinfectez la lame à l’alcool entre chaque coupe. C’est de la chirurgie végétale !

La technique la plus simple : la greffe en écusson

C’est la plus polyvalente, parfaite pour les jeunes porte-greffes (diamètre d’un crayon).

période de greffe d'un citronnier schema greffe fouetee differentes brandilles
  1. Préparez le porte-greffe : Nettoyez une zone lisse sur le tronc, à 15-20 cm du sol.
  2. Dessinez un T : Avec la pointe du greffoir, faites une incision verticale de 3 cm, puis une horizontale de 1 cm au sommet pour former un T. Coupez l’écorce, mais sans attaquer le bois en dessous.
  3. Prélevez l’écusson : Sur votre branche de la variété choisie, prélevez un beau bourgeon (un œil) avec un petit bouclier d’écorce autour. Laissez un bout de la tige de la feuille (le pétiole), ça servira de poignée et d’indicateur.
  4. Insérez et ligaturez : Soulevez délicatement les lèvres du T et glissez l’écusson dedans. Enroulez le tout fermement avec du ruban à greffer spécial (on en trouve pour quelques euros), en laissant le bourgeon et le pétiole à l’air libre.

Le verdict ? Après 3-4 semaines, touchez doucement le petit bout de pétiole. S’il tombe, c’est gagné ! S’il reste sec et accroché, c’est probablement un échec.

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Les soins après la greffe : ne relâchez pas vos efforts

Le travail n’est pas fini !

  • La chasse aux gourmands : Le porte-greffe va tenter de faire ses propres pousses sous le point de greffe. Il faut les enlever dès qu’elles apparaissent, sinon elles voleront toute l’énergie au greffon.
  • Le coup de pouce final : Au printemps suivant, une fois que vous êtes sûr que la greffe a pris, coupez la tige du porte-greffe juste 1 cm au-dessus de votre greffon. C’est radical, mais ça force toute la sève à se concentrer sur votre nouveau bourgeon, qui va exploser en une nouvelle branche.
  • Tuteurez la pousse : La nouvelle branche est fragile. Un petit tuteur l’aidera à pousser droit et à résister au vent.

Pour finir : les 3 erreurs qui tuent un projet citronnier

Si vous ne deviez retenir que trois choses pour éviter la catastrophe, ce seraient celles-ci :

  1. Mettre de l’engrais sur un arbre malade. Je le répète, c’est le meilleur moyen de l’achever. On ne nourrit pas un patient en soins intensifs.
  2. Choisir un pot beaucoup trop grand lors du rempotage. L’excès de terre retient trop d’eau, ce qui favorise la pourriture des racines. Allez-y progressivement, un pot à peine plus grand suffit.
  3. Oublier de supprimer les gourmands sous la greffe. Si vous les laissez, le porte-greffe prendra le dessus et votre greffon ne se développera jamais.

la patience est une vertu de jardinier

Honnêtement, sauver ou greffer un citronnier demande de l’observation, un peu de technique et une bonne dose de patience. Ne vous découragez pas si vous ratez vos premières greffes, ça fait partie de l’apprentissage ! C’est en faisant, en observant et en comprenant ses erreurs qu’on progresse.

Le plus gratifiant, c’est de commencer à comprendre le langage de votre plante. Une feuille qui jaunit, une branche qui sèche… ce sont des messages. Il y a peu de satisfactions comparables à celle de voir repartir un arbre qu’on croyait perdu, ou de croquer dans le premier citron d’une greffe qu’on a réalisée soi-même. C’est ça, le dialogue silencieux et magique entre la nature et la main de l’homme.

Laurine Benoit

Designer d'Intérieur & Consultante en Art de Vivre
Domaines de prédilection : Aménagement intérieur, Éco-conception, Tendances mode
Après des années passées à transformer des espaces de vie, Laurine a développé une approche unique qui marie esthétique et fonctionnalité. Elle puise son inspiration dans ses voyages à travers l'Europe, où elle découvre sans cesse de nouvelles tendances et techniques. Passionnée par les matériaux durables, elle teste personnellement chaque solution qu'elle recommande. Entre deux projets de rénovation, vous la trouverez probablement en train de chiner dans les brocantes ou d'expérimenter de nouvelles palettes de couleurs dans son atelier parisien.