Figues et Guêpes : On vous dit enfin la vérité (et comment avoir les vôtres !)

Auteur Gabrielle Lambert

C’est la question qui revient tout le temps. Que ce soit au marché, entre deux étals, ou quand des amis passent donner un coup de main au jardin. Ils prennent une figue, la tournent, l’air un peu suspicieux, et finissent par lâcher : « C’est vrai qu’il y a une guêpe morte là-dedans ? ».

Honnêtement, cette question me fait toujours sourire. C’est la porte d’entrée vers une histoire de dingue, celle d’un pacte secret entre une plante et un insecte. Une histoire que je pourrais raconter pendant des heures.

Alors, mettons les choses au clair une bonne fois pour toutes : oui, techniquement, une guêpe est parfois impliquée. Mais l’histoire est bien plus fascinante que ça. Et surtout, la grande majorité des figues que vous croquez n’ont JAMAIS vu l’ombre d’une guêpe. Allez, je vous explique tout ça simplement, comme si on était au fond du jardin.

La figue : un jardin secret, pas un fruit ordinaire

Premier point essentiel : la figue n’est pas un fruit comme la pomme ou la cerise. Ces dernières ont leurs fleurs bien en évidence, ouvertes à tous les vents, attendant sagement les abeilles. Le figuier, lui, est bien plus discret, presque timide.

y a t il une guepe à l intérieur de la figue manger figue guepe

En fait, une figue, c’est une fleur inversée. On appelle ça un sycone. Imaginez une fleur dont on replierait les pétales vers l’intérieur jusqu’à former une petite urne. Les centaines de petits filaments que vous voyez à l’intérieur, ce sont les vraies fleurs ! Chacune peut donner une minuscule graine croquante. Une figue, c’est donc un bouquet de fleurs caché dans une poche.

Évidemment, ça pose un sacré problème : comment le pollen fait-il pour arriver jusqu’à ces fleurs enfermées ? Les abeilles sont trop grosses, le vent ne peut pas entrer… La nature a donc mis au point une solution sur mesure, une clé unique pour cette serrure végétale : une guêpe minuscule, le blastophage.

Le pacte de vie : l’incroyable rôle de la guêpe du figuier

Ce petit insecte, qui fait à peine 1 ou 2 millimètres, a une vie totalement liée à celle du figuier. C’est ce qu’on appelle un mutualisme obligatoire : l’un ne peut pas se reproduire sans l’autre. Un contrat signé il y a des millions d’années.

figue avec guepe à l intérieur est ce qu on mange une guepe avec la figue

Le cycle est fascinant. Une guêpe femelle, pleine de pollen, cherche une jeune figue pour y pondre. Attirée par une odeur que seule elle peut détecter, elle trouve l’entrée de la figue, un trou minuscule appelé ostiole. Le passage est si étroit qu’en forçant pour entrer, elle se brise les ailes et les antennes. C’est un aller simple, et elle le sait.

Une fois dedans, elle pond ses œufs dans certaines fleurs et en pollinise d’autres. Sa mission accomplie, piégée et épuisée, elle meurt. Mais son sacrifice assure à la fois le futur de ses petits et celui du figuier.

Alors, on mange la guêpe ?

C’est là que certains font la grimace. Mais respirez, il n’y a pas de quoi ! En mûrissant, la figue produit une enzyme surpuissante, la ficine. Cette enzyme va tout simplement décomposer intégralement le corps de la guêpe. Elle la digère et la transforme en protéines que la figue absorbe. Il ne reste absolument rien. Pas de pattes, pas d’ailes, rien qui croque sous la dent. Juste de la pulpe délicieusement sucrée.

figuier manger une figue manger une guêpe est ce vrai

Dire qu’on mange une guêpe est un raccourci. En réalité, on mange les éléments qui, un jour, ont constitué une guêpe, mais qui ont été entièrement recyclés par la plante. C’est l’économie circulaire de la nature dans toute sa splendeur.

La vérité que peu de gens connaissent : la plupart de vos figues sont « sans guêpe »

Maintenant, accrochez-vous, voici l’info qui va rassurer tout le monde. La quasi-totalité des figues que vous trouvez chez le primeur ou que vous cultivez proviennent de variétés qui n’ont AUCUN besoin de pollinisation.

Dans le jargon, on les appelle des figuiers « parthénocarpiques ». Un mot compliqué pour dire qu’ils font des fruits sans fécondation. Pas de pollen, donc pas besoin de la visite de notre fameuse guêpe. La figue se forme et mûrit toute seule, par la magie de la nature.

D’ailleurs, les variétés les plus connues sont de ce type :

  • La ‘Goutte d’Or’ : On la reconnaît à sa peau jaune et à la petite perle de suc qui apparaît quand elle est mûre. Un pur délice, extra en confiture.
  • La ‘Noire de Caromb’ : Une petite figue violette très sucrée, parfaite à déguster fraîche, juste cueillie.
  • La ‘Marseillaise’ : Un grand classique des jardins du sud, petite, verte avec une pulpe bien rouge.
  • La ‘Brown Turkey’ (ou Noire de Turquie) : Celle-ci est votre meilleure amie si vous n’habitez pas dans le sud ! Elle est très résistante au froid et s’adapte à de nombreux climats.

Bon à savoir : si vous achetez un figuier en jardinerie, il y a 99% de chances qu’il soit autofertile. C’est le conseil de base pour tout amateur : choisissez une de ces variétés et vous aurez des figues à coup sûr, sans prise de tête.

guepe de figue photo intérieur figue avec guepe décomposée en protéines

Je veux mon propre figuier ! Le guide du débutant

Ça vous tente ? Franchement, c’est l’un des arbres fruitiers les plus gratifiants et faciles à vivre. Voici de quoi vous lancer.

La petite liste de courses :

Pour commencer, pas besoin de se ruiner. Il vous faut : un jeune figuier autofertile (comptez entre 25€ et 50€ en pépinière), un grand pot si vous êtes en appartement, un sac de bon terreau pour plantes méditerranéennes (environ 10€) et une paire de gants (5€). Et c’est tout !

Même sur un balcon, c’est possible ?

Absolument ! Le figuier se plaît très bien en pot. C’est une super solution pour ceux qui n’ont qu’une terrasse ou un balcon. Choisissez une variété à développement modéré comme la ‘Dalmatie’ ou la ‘Goutte d’Or’. Prévoyez un pot d’au moins 40-50 cm de diamètre pour lui laisser de la place. L’avantage du pot, c’est que vous pourrez le rentrer ou le protéger facilement l’hiver si vous êtes dans une région froide.

manger des figues origines reproduction pollinisation de la figue

Et si j’habite dans le Nord ?

Pas de panique ! Choisissez une variété réputée résistante au froid comme la ‘Brown Turkey’ ou la ‘Pastilière’. Plantez-la contre un mur exposé plein sud pour qu’elle profite de la chaleur. L’hiver, un bon paillage au pied (15-20 cm de feuilles mortes ou de paille) et un voile d’hivernage pour emballer les branches suffiront à la protéger des grosses gelées.

Quand aurai-je mes premières figues ?

Un peu de patience… Un jeune arbre met souvent 2 à 3 ans avant de donner sa première vraie récolte généreuse. Mais l’attente en vaut la peine !

SOS : Mon figuier ne donne pas de fruits !

C’est la hantise du jardinier amateur. Si après quelques années, rien ne se passe, voici les 3 coupables les plus fréquents :

  1. Le manque de soleil : C’est la cause n°1. Un figuier est une plante du sud. Il lui faut au MINIMUM 6 à 8 heures de soleil direct par jour. S’il est à l’ombre, il fera de belles feuilles, mais pas de fruits.
  2. Une erreur de jeunesse : L’arbre est peut-être simplement trop jeune. Donnez-lui encore un an ou deux.
  3. La taille : On taille très peu un figuier. Faites-le à la fin de l’hiver, quand il ne gèle plus. Contentez-vous d’enlever le bois mort et les branches qui se croisent au centre pour laisser entrer la lumière. Une taille trop sévère peut supprimer la récolte de l’année.
fruit de saison figue fleur ou fruit pollinisation par une guepe de figue

Le petit mot du gourmand

Une fois que vous avez vos figues, le plus dur est de ne pas tout manger sur l’arbre. Une bonne figue est souple au toucher, mais pas molle. Sa peau est fine et elle doit être lourde pour sa taille.

Attention, c’est un fruit très fragile. Conservez-la 2 jours maximum au frigo. Le mieux, c’est de la manger le jour même. Simplement ouverte en deux, rôtie au four avec du miel et du romarin, ou en confiture… un régal. Et ne jetez pas la peau si elle est bio, elle est pleine de goût !

Attention ! Le secret de la sève

Un dernier conseil, et pas des moindres. La sève du figuier, ce latex blanc qui coule quand on coupe une feuille, est photosensibilisante. Si vous en avez sur la peau et que vous allez au soleil, vous risquez de sérieuses irritations ou brûlures.

Croyez-moi sur parole, je me suis fait avoir au début en taillant en t-shirt sous le soleil d’été, et ça ne pardonne pas. Mettez TOUJOURS des gants et des manches longues pour le manipuler.

un petit miracle à savourer

Alors, la prochaine fois que vous tiendrez une figue dans votre main, ne pensez plus à cette histoire de guêpe. Pensez plutôt à l’incroyable ingéniosité de la nature. Que ce soit le résultat du sacrifice d’un insecte ou le don généreux d’un arbre autofertile, le résultat est le même : un fruit délicieux, gorgé de soleil et d’histoire.

Admirez ce petit jardin intérieur, savourez sa douceur… et pourquoi ne pas planter le vôtre ?

Gabrielle Lambert

Créatrice DIY & Adepte de la Récup'
Ses projets favoris : Transformations créatives, Récupération stylée, Déco fait-main
Gabrielle a toujours vu le potentiel caché des objets abandonnés. Petite, elle transformait déjà les cartons en châteaux et les bouteilles en vases colorés. Cette passion ne l'a jamais quittée. Après avoir travaillé dans l'événementiel, elle s'est tournée vers le partage de ses techniques créatives. Son appartement marseillais est un véritable laboratoire où chaque meuble raconte une histoire de transformation. Elle adore dénicher des trésors dans les vide-greniers du dimanche et leur donner une seconde vie surprenante.