Tuer une souche avec du sel : Le guide SANS langue de bois (délais, risques & astuces de pro)

Auteur Lilou Garnier

On va se parler franchement. Après plus de vingt ans à bosser dans les parcs et jardins, s’il y a bien une question qui revient tout le temps, c’est celle de la souche. On abat un arbre, par choix ou par obligation, et hop, on se retrouve avec ce morceau de bois tenace qui nous nargue au milieu de la pelouse. C’est moche, ça bousille la lame de la tondeuse, et ça peut même devenir un nid à problèmes pour le reste du jardin.

Alors, que faire ? Parmi les solutions qui circulent, il y a cette fameuse méthode au sel. Une sorte de recette de grand-mère du jardinage. La question qu’on me pose, c’est : « est-ce que ça marche vraiment ? ». La réponse est oui… mais ce n’est pas de la magie. C’est un processus lent, qui demande un peu de méthode et, surtout, d’être bien conscient des risques. Car non, le sel n’est pas anodin pour votre terre.

comment empecher une souche darbre de repousser

Ici, je ne vais pas vous vendre du rêve. Je vais vous partager mon expérience de terrain, la vraie. On va décortiquer ensemble comment ça fonctionne, comment bien s’y prendre, et surtout, quand il vaut mieux laisser tomber et choisir une autre option.

Pourquoi vouloir à tout prix se débarrasser d’une souche ?

Avant même de penser à sortir la perceuse, posons-nous la bonne question : pourquoi l’enlever ? Ce n’est pas juste pour faire joli.

Le premier truc, c’est le danger bête et méchant. Une souche qui affleure, c’est la gamelle assurée pour les enfants qui courent ou pour vous-même en passant la tondeuse. D’ailleurs, parlons-en de la tondeuse… j’ai vu un nombre incalculable de carters fendus à cause d’une rencontre imprévue avec une souche. Ça coûte cher en réparation !

Ensuite, il y a le risque biologique. Une souche, c’est du bois mort qui se décompose. C’est un véritable buffet à volonté pour tout un tas de bestioles et de champignons. Dans certaines régions, les termites peuvent y faire leur nid avant de s’intéresser à votre maison. Plus couramment, la souche devient le foyer de champignons pas très sympas, comme l’armillaire. Une fois installé, ce dernier peut se propager en sous-sol et attaquer les racines de vos arbres et arbustes en parfaite santé. Enlever la souche, c’est une mesure de prévention pour tout le jardin.

souche d arbre trouée

Et puis, il y a les rejets. Certaines essences comme le robinier, le peuplier ou le cerisier sont d’une ténacité incroyable. Même après l’abattage, la souche a assez de jus pour lancer des dizaines de nouvelles pousses. Si vous ne la neutralisez pas, vous allez passer des années à jouer du sécateur.

La science derrière le sel : comment ça tue le bois ?

Pour que ça marche, il faut comprendre le mécanisme. Ce n’est pas de la sorcellerie, c’est juste un principe physique : l’osmose. En gros, le sel, en se dissolvant dans l’humidité du bois, crée une solution hyper-concentrée. Cette concentration va littéralement aspirer l’eau contenue dans les cellules de la souche pour essayer de se diluer. Résultat : les cellules se déshydratent complètement et meurent. C’est un dessèchement forcé, de l’intérieur.

Maintenant, quel sel choisir ? Il y en a deux principaux, et ils ne jouent pas dans la même catégorie.

comment detruire une souche naturellement avec sel d epsom cuilliere en bois planche

Le sel d’Epsom (Sulfate de magnésium)
Franchement, si vous tenez à cette méthode, c’est celui-ci que je vous recommande. On le trouve facilement en pharmacie, en jardinerie ou en ligne pour environ 15-20€ le sac de 5 kg. L’avantage, c’est que le magnésium et le soufre sont, à petite dose, des nutriments. Mais ici, en surdose, ils deviennent toxiques et empêchent la souche d’absorber d’autres minéraux vitaux. L’impact sur le sol est moins dévastateur que son cousin, mais il faut rester prudent.

Le sel gemme (ou sel de déneigement)
Là, on est sur du lourd. C’est du chlorure de sodium, le même que sur les routes l’hiver. C’est un poison violent pour la plupart des végétaux. Oui, il va tuer la souche à coup sûr, mais il va aussi transformer la zone en désert pour plusieurs années. J’ai vu des cas où, trois ans après, rien ne poussait dans un rayon d’un mètre. À n’utiliser qu’en dernier recours absolu, si la souche est totalement isolée.

sel de gemme couleur rose dans un bol

La méthode pas à pas : les bons gestes pour réussir

Si vous êtes décidé, alors faisons les choses bien. La préparation et la précision, c’est 90% du boulot.

Étape 1 : Le matos nécessaire

  • Protection : Des lunettes de sécurité, c’est NON NÉGOCIABLE. Un éclat de bois dans l’œil, ça n’arrive pas qu’aux autres. Des gants de travail, c’est mieux.
  • Une perceuse qui en a dans le ventre : Une perceuse à percussion, c’est l’idéal, surtout pour les bois durs.
  • Une grosse mèche à bois : Visez un diamètre de 20-25 mm et au moins 30 cm de long. Vous trouverez ça dans n’importe quel magasin de bricolage pour 20 à 40€ selon la qualité. C’est un petit investissement, mais c’est la clé.
  • Du sel d’Epsom : Comptez 500g à 1kg pour une souche de taille moyenne.
  • De quoi boucher les trous : Des bouchons de liège (astuce de pro !), de la cire de bougie naturelle ou même des galets plats.
  • Une bâche en plastique noir et des pierres pour la maintenir.

Étape 2 : Préparer la souche
Si l’arbre vient d’être coupé, c’est parfait. Sinon, donnez un coup de tronçonneuse pour rafraîchir la surface. Coupez-la le plus bas possible, à 5-10 cm du sol.

detruire une souche d arbre avec du sel

Étape 3 : Le perçage stratégique
C’est l’étape cruciale. Ne percez pas au pif !

  • L’angle : Inclinez votre perceuse à 45 degrés, vers le bas et vers le centre. Ça permet au sel de bien rester dans le trou et de s’infiltrer avec l’humidité.
  • La profondeur : Allez chercher au moins 20-25 cm de profondeur. Sur une grosse souche, n’hésitez pas à viser 30 cm.
  • La disposition : Faites une première couronne de trous à 3-5 cm du bord (c’est là que se trouve la partie la plus vivante). Espacez les trous de 8 à 10 cm. Si la souche est large, faites une deuxième couronne plus au centre.

Étape 4 : Le remplissage
Remplissez chaque trou de sel d’Epsom, mais pas à ras bord. Laissez un peu de place pour le bouchon. Ne tassez pas.

Étape 5 : Le scellement
C’est super important pour éviter que la pluie ne lessive tout votre travail et ne contamine le sol. La cire, c’est bien, mais un bouchon de liège enfoncé en force, c’est encore mieux. C’est étanche et ça dure.

souche d'arbre avec des trous

Étape 6 : Couvrir la bête
Recouvrez toute la souche avec la bâche noire et calez-la avec des pierres. La bâche va la priver de lumière (adieu les rejets) et garder l’humidité, ce qui va accélérer le travail du sel.

Alors, on attend combien de temps ? (La patience est une vertu)

Ici, il faut être honnête : oubliez les résultats en quinze jours. Le timing dépend de plusieurs choses :

  • L’essence de l’arbre : Un bois tendre comme un pin ou un peuplier peut commencer à pourrir en 6 à 12 mois. Mais pour un bois dur comme le chêne ou l’acacia… on parle plutôt de 18 mois à 3 ans. Voire plus ! Je me souviens d’une souche de robinier que je pensais plier en un an. Deux ans plus tard, elle me narguait encore avec des rejets ! Ça apprend l’humilité.
  • La taille de la souche : Logique, une petite souche de 20 cm mourra plus vite qu’un monstre de 80 cm.
  • Le climat : Dans une région humide, le sel agira mieux. Dans le sud, la chaleur aide à la décomposition, mais la sécheresse peut bloquer le processus. Mon conseil : s’il ne pleut pas pendant des semaines, soulevez la bâche et versez un petit verre d’eau dans chaque trou pour réactiver le sel.

Bon à savoir : le meilleur moment pour commencer, c’est l’automne. La sève de l’arbre redescend vers les racines et va aider à diffuser le sel dans tout le système. C’est un petit coup de pouce non négligeable.

souche d'arbre fleurs rouge jardin decoration

Sel vs. Autres méthodes : le match

Le sel, c’est une option, mais ce n’est pas la seule. Juste pour que vous ayez une vue d’ensemble :

La rogneuse de souche (ou dessoucheuse) est la solution radicale. Un pro vient avec sa machine et en une heure, il n’y a plus rien. C’est rapide, net, mais ça a un coût. Comptez entre 150€ et 400€ pour une intervention. C’est la F1 des méthodes.

Les produits chimiques du commerce, à base de nitrate de potassium, sont aussi efficaces. Ils accélèrent la décomposition. C’est plus rapide que le sel, mais on reste sur des produits de synthèse assez puissants. À manipuler avec précaution.

Laisser la nature faire son œuvre est la méthode la plus écolo… et la plus longue. On parle de 5, 10, voire 15 ans. Il faut juste être très, très patient.

La méthode au sel se situe un peu entre tout ça. C’est la solution économique et « low-tech » pour le jardinier patient qui veut éviter les produits trop agressifs et les grosses dépenses.

Les VRAIS risques : ce qu’on oublie de vous dire

Mon rôle, c’est aussi de vous alerter. Le sel, ce n’est pas un jeu.

La contamination du sol est LE risque numéro 1. Le sel va forcément migrer dans la terre. J’ai été appelé une fois pour un magnifique hortensia qui dépérissait. Le client ne comprenait pas, jusqu’à ce qu’il se souvienne avoir traité au sel une souche à un mètre de là, deux ans plus tôt. Le sel avait voyagé sous terre et tuait l’hortensia à petit feu. Prévoyez une zone de sécurité de 1 à 2 mètres autour de la souche où vous ne planterez rien de fragile pendant quelques années.

Attention aussi aux dommages collatéraux. Les racines des arbres s’entremêlent. Si votre souche est proche d’une haie ou d’un autre arbre, le sel peut les atteindre. Soyez hyper vigilant.

Enfin, un petit point sur la réglementation. Ça peut paraître surprenant, mais certaines communes ou règlements de copropriété interdisent l’usage de produits de dévitalisation non homologués, même s’il s’agit de sel. Un petit coup d’œil rapide aux règles locales avant de commencer, ça évite les ennuis.

Lilou Garnier

Experte Vie de Famille & Jardinière en Herbe
Ses univers : Jardins familiaux, Déco pour enfants, Activités nature
Maman de trois enfants, Lilou a appris à créer des espaces qui concilient beauté et praticité. Sa maison normande avec son grand jardin est devenue son terrain d'expérimentation favori. Elle y teste toutes ses idées d'aménagements kid-friendly et de projets jardinage en famille. Convaincue que les enfants apprennent mieux au contact de la nature, elle invente sans cesse de nouvelles activités créatives. Le dimanche, toute la famille met la main à la pâte pour entretenir leur potager ou construire des cabanes dans les arbres.