Terrasse en bois : Le guide d’un pro pour faire le bon choix (et ne pas le regretter)

Auteur Marion Bertrand

Ça fait plus de vingt ans que j’ai les mains dans le bois. J’ai commencé comme apprenti, fasciné par cette matière vivante, et aujourd’hui, je continue de construire des terrasses avec ma propre équipe. J’en ai vraiment vu de toutes les couleurs : des projets superbes qui défient le temps, mais aussi, franchement, des erreurs qui coûtent un bras. Et la décision n°1, celle qui conditionne tout le reste, c’est le choix du bois.

Je vois souvent des clients arriver, des photos de magazines à la main, avec une idée bien précise. C’est super, mais il faut garder les pieds sur terre. Une terrasse, ce n’est pas un meuble d’intérieur. Elle va affronter la pluie, le soleil qui tape, le gel, nos allées et venues… Un mauvais choix, et votre rêve se transforme en corvée d’entretien, voire en danger. Mon but ici, c’est de vous donner les clés que j’ai mis des années à comprendre sur le terrain. Pour que votre choix soit le bon, pour vous, et pour longtemps.

chaise en bois, chat qui se repose sur une terrasse en bois, vieil évier en pierre

La base de tout : la fameuse classe d’emploi

Avant même de rêver à la couleur de votre bois, il y a un truc essentiel à comprendre : la classe d’emploi. C’est une norme technique qui classe les bois selon leur résistance à l’humidité et aux petites bêtes (insectes, champignons). C’est simple, et c’est la toute première chose que je vérifie.

Pour faire court :

  • Classe 1 et 2 : C’est pour l’intérieur, bien au sec. On oublie complètement pour une terrasse.
  • Classe 3 : Pour l’extérieur, mais sans contact direct avec l’eau stagnante. Un bardage sur un mur, par exemple. Pas assez costaud pour le plat d’une terrasse.
  • Classe 4 : C’est le minimum syndical pour une terrasse. Ce bois peut être en contact permanent avec l’eau douce. Vos lames ET votre structure (les lambourdes en dessous) doivent être au minimum de classe 4. Ce n’est pas négociable.
  • Classe 5 : Le top du top. Ce bois résiste même à l’eau de mer. On s’en sert pour les pontons ou les terrasses vraiment en bord d’océan.

Ignorer ça, c’est la garantie d’une terrasse qui pourrit en quelques années. J’ai déjà dû démonter des structures entières faites avec du bois de classe 2 par des bricoleurs mal conseillés… Un vrai désastre et de l’argent jeté par les fenêtres.

construire une terrasse en bois, lames de bois usées, baskets oranges, comment fabriquer une terrasse extérieure

Pourquoi votre terrasse va-t-elle bouger ? (et c’est normal !)

Le bois, même coupé, reste une matière « vivante ». Il est hygroscopique, un mot un peu barbare pour dire qu’il absorbe l’humidité de l’air (et gonfle) et la relâche quand l’air est sec (et se rétracte). C’est inévitable.

C’est exactement pour cette raison qu’on laisse un espace entre les lames. Sans ce jeu, dès la première grosse pluie, les lames gonfleraient, se pousseraient les unes contre les autres jusqu’à faire sauter les vis ou se déformer complètement. L’espacement standard est de 5 à 7 mm.

Petit cas pratique : Pour des lames d’Ipé très sèches de 145 mm de large que vous posez en plein mois de juillet, je conseille de laisser 7 mm. En revanche, pour du Pin traité que vous installez un jour d’automne bien humide, 5 mm suffiront, car il est déjà un peu gonflé.

Les grandes familles de bois : avantages, inconvénients et… le PRIX !

Maintenant qu’on a les bases, parlons concret. Je classe les bois en trois grandes familles, plus une alternative moderne qui mérite vraiment le détour.

terrasse en bois, grandes poutres de bois veiné, rambardes en bois, chaise d'extérieur

1. Les résineux : l’option économique et locale

C’est le choix le plus courant, souvent pour des raisons de budget. On parle ici surtout du Pin et du Douglas, des bois qui poussent chez nous en Europe.

Le Pin traité autoclave

C’est le champion des petits budgets. Le pin seul n’est pas assez durable, alors on le traite en profondeur dans un grand cylindre (l’autoclave) pour lui injecter des produits de préservation et le faire passer en classe 4. C’est ce qui lui donne cette teinte un peu verte ou marron au début.

  • Mon avis de pro : Le pin fait le job, mais il faut être réaliste. Attendez-vous à une durée de vie de 10 à 15 ans, pas plus. C’est un bois tendre : une chaise qu’on traîne, un objet qui tombe, et hop, une marque. Avec le temps, il a aussi tendance à faire des échardes, pas idéal si on aime marcher pieds nus.
  • Budget : C’est le plus abordable, on est généralement entre 20€ et 45€ le m². Vous le trouverez partout, chez Leroy Merlin, Castorama ou Brico Dépôt.
  • Conseil d’ami : Si vous pouvez, choisissez du Pin du Nord (Scandinavie). Il pousse plus lentement, donc ses fibres sont plus denses et il est plus stable. Et pitié, utilisez des vis en inox ! Des vis juste galvanisées vont réagir avec le traitement et créer des coulures noires affreuses.

Le Douglas

pelouse verte, terrasse sur gazon, basjets oranges, pots de fleur, constuire une terrasse en bois

Une super alternative locale, surtout si vous habitez près de régions forestières. Le Douglas est naturellement plus résistant que le pin. Son cœur (le duramen) est déjà en classe 3. Pour une terrasse, on le trouve souvent traité pour atteindre la classe 4.

  • Mon avis de pro : J’aime bien le travailler. Il est un peu plus dense que le pin, avec une jolie couleur rosée. Il grisonne joliment avec le temps si on ne l’entretient pas.
  • Budget : Un peu plus cher que le pin, comptez entre 30€ et 55€ le m². On le trouve chez les négociants en matériaux (Point.P, Réseau Pro) ou directement dans les scieries locales.

2. Les bois exotiques : la Rolls des terrasses

Venus d’ailleurs, ces bois sont des monstres de densité. Ils sont naturellement classe 4 ou 5, blindés de résines qui repoussent insectes et pourriture. On parle d’Ipé, de Cumaru, de Padouk…

extérieur de chalet de montagne, sapins verts, ciel aux nuages blancs, terrasse en bois exotique
  • Mon expérience : C’est un autre monde. Ils sont si durs qu’il est impossible de visser directement. On doit pré-percer chaque trou. Les lames de scie s’usent à vue d’œil. Mais le résultat est incomparable : pas d’échardes, une stabilité incroyable et une durée de vie qui peut dépasser 40 ans.
  • Budget et éthique : On change de division. Prévoyez entre 80€ et plus de 150€ le m² pour de l’Ipé. Attention ! C’est un investissement, alors n’achetez JAMAIS de bois exotique sans certification (FSC ou PEFC). Ces labels sont la seule garantie (même si imparfaite) que le bois ne vient pas de la déforestation. Un prix trop bas est toujours un mauvais signe.
  • L’erreur à ne jamais faire : Je me souviens d’un client qui, pour économiser à peine 50€, a utilisé des vis galvanisées sur sa terrasse en Cumaru toute neuve. Six mois plus tard, il m’a rappelé, dépité : des coulures noires de rouille partout, impossibles à enlever. On a dû tout démonter… Une journée de perdue et un surcoût de plusieurs centaines d’euros pour une petite économie de rien du tout.

3. Le bois composite : la promesse du « zéro entretien » (ou presque)

Le composite, c’est un mélange de fibres de bois recyclées et de résine plastique. L’idée est d’imiter le bois sans les contraintes.

  • Mon avis, très honnêtement : J’en ai posé pas mal. Ça peut être très propre, mais il y a des inconvénients que les vendeurs « oublient » parfois. Le plus gros, c’est la chaleur. Une terrasse en composite foncé plein sud, c’est un barbecue. Oubliez la marche pieds nus en été. De plus, il se dilate beaucoup avec la température, il faut donc suivre les instructions de pose à la lettre.
  • Qualité et réparation : La qualité varie énormément. L’entrée de gamme fait très plastique. Le haut de gamme est bluffant mais coûte aussi cher qu’un bois exotique. Et attention, une rayure profonde ne se ponce pas, et une lame abîmée doit être changée (ce qui peut être un casse-tête).
  • Budget : La fourchette est immense, de 40€/m² à plus de 120€/m² pour les marques premium à lames pleines (que je recommande, car bien plus solides que les lames creuses).

4. L’alternative maline : les bois européens traités thermiquement (THT)

C’est une solution que j’adore et que je propose de plus en plus. On prend des bois de chez nous (Frêne, Hêtre) et on les chauffe à très haute température sans oxygène. Ce processus modifie le bois en profondeur, le rendant aussi stable et durable qu’un bois exotique (classe 4).

  • Mon expérience : Le frêne THT est magnifique, avec une couleur caramel uniforme. Il est super léger et stable. C’est une super alternative écologique aux exotiques.
  • À savoir : Ce traitement le rend un peu plus cassant. Il faut le manipuler avec soin et toujours pré-percer.
  • Budget : On se situe souvent dans la même gamme de prix que les bois exotiques d’entrée de gamme, soit entre 60€ et 90€ le m².

L’essentiel est invisible : la structure !

Je le dis et le répète : vous pouvez avoir les plus belles lames du monde, si la structure en dessous est bancale, votre terrasse est fichue. C’est 50% de la réussite du projet ! Et n’oubliez jamais : la structure, c’est facilement 30 à 40% de votre budget total !

Quelques règles d’or :

  • L’entraxe : C’est la distance entre vos lambourdes (les poutres de soutien). Pour des lames de 21 mm d’épaisseur, ne dépassez pas 50 cm. Si vous avez des lames de 28 mm, vous pouvez aller jusqu’à 60-65 cm.
  • La ventilation : L’air doit circuler sous la terrasse. Laissez au moins 10 cm entre le sol et le dessous des lames. Sur une dalle en béton, des plots réglables sont parfaits pour ça.
  • La protection : Je conseille toujours de poser une bande bitumineuse sur le dessus des lambourdes. C’est un petit coût en plus, mais ça les protège de l’eau qui s’infiltre entre les lames et double leur durée de vie.

Au fait, c’est quoi un saturateur ? Bonne question ! Contrairement à une lasure qui crée un film en surface (et qui finit par peler), le saturateur pénètre dans le bois pour le nourrir en profondeur. C’est pour ça qu’il faut toujours essuyer l’excédent après l’application. Il ne doit pas briller !

Ma le meilleur bois, c’est le VÔTRE

Il n’y a pas de solution miracle. Le meilleur bois, c’est celui qui correspond à votre projet, votre budget, et au temps que vous êtes prêt à y consacrer.

Pour résumer :

  • Budget serré (20-45€/m²) et l’entretien ne vous fait pas peur : Pin traité ou Douglas. Durée de vie d’environ 15 ans.
  • Durabilité maximale, esthétique avant tout et budget confortable (80-150€/m²) : Un bois exotique certifié. Un investissement pour plus de 40 ans de tranquillité.
  • L’alternative écolo et design (60-90€/m²) : Un bois thermo-traité comme le frêne.
  • L’horreur de l’entretien et la chaleur estivale n’est pas votre critère n°1 : Un composite de bonne qualité, à lames pleines.

Et mon tout dernier conseil, le plus important : allez voir le bois en vrai ! Ne choisissez pas sur un catalogue. Allez chez un négociant, demandez des échantillons, touchez la matière, sentez son poids. Une terrasse est un investissement plaisir. Prenez le temps de bien choisir, construisez sur une base saine, et vous en profiterez pendant des décennies.

Inspirations et idées

Le bois de votre terrasse a grisé et vous vous demandez s’il faut le récupérer ?

C’est avant tout un choix esthétique. Le grisaillement est un processus naturel de protection de surface du bois face aux UV ; il n’altère en rien sa solidité. Si vous aimez cet aspect argenté et authentique, un simple nettoyage annuel au savon noir suffira. Pour retrouver la teinte d’origine, il faudra appliquer un dégriseur puis un saturateur, comme le Textrol d’Owatrol, une à deux fois par an pour nourrir le bois et le protéger de l’eau.

Plus de 80% des problèmes de taches sur les terrasses en bois sont dus à l’utilisation de visserie non adaptée, provoquant des coulures de rouille.

Ce n’est pas un détail. Pour la fixation de vos lames, l’inox est obligatoire. Oubliez les vis zinguées ou bichromatées qui rouilleront en moins d’un an. Optez pour de l’inox A2 si vous êtes loin de la mer ou d’une piscine, et impérativement de l’inox A4 (qualité marine) en environnement salin ou chloré. Des marques comme Spax proposent des vis spéciales terrasse avec double filetage qui assurent un placage parfait et durable.

Bois exotique : L’Ipé ou le Cumaru sont réputés pour leur densité et leur stabilité exceptionnelles. Ils résistent naturellement aux insectes et à l’humidité (classe 4 ou 5) et offrent une longévité de plus de 25 ans sans traitement lourd.

Pin traité autoclave : Plus économique, le pin est un résineux qui a subi un traitement en profondeur pour atteindre la classe 4. Sa durée de vie est plus courte (10-15 ans) et il est plus sensible aux déformations et aux fissures avec le temps.

Le choix se fait donc entre l’investissement initial et la durabilité maximale, ou une solution plus accessible demandant un suivi plus régulier.

  • Une surface parfaitement lisse, sans aucune vis apparente.
  • Un confort de marche pieds nus inégalé, sans risque d’écharde.
  • Une esthétique épurée et contemporaine qui met en valeur le bois.

Le secret ? Les systèmes de fixation invisible. Des clips ou des profils spécifiques (comme le Hapax Fixing Pro) se placent sous ou sur le côté des lames, les rendant solidaires des lambourdes sans percer la surface.

Point important : La ventilation est la clé de la longévité de votre terrasse. L’air doit pouvoir circuler librement sous les lames pour évacuer l’humidité. Assurez-vous de laisser un espace d’au moins 5 mm entre chaque lame, et que la structure elle-même soit surélevée du sol grâce à des plots réglables. Une terrasse posée directement sur une dalle béton sans circulation d’air est une garantie de pourrissement accéléré, même avec un bois de classe 4.

Pour un entretien efficace avant l’application d’un saturateur, suivez ces étapes simples :

  • Balayez soigneusement pour enlever feuilles et débris.
  • Appliquez un dégriseur spécifique pour bois extérieur au pulvérisateur.
  • Frottez dans le sens des fibres avec une brosse à poils durs (jamais de nettoyeur haute pression qui abîme les fibres !).
  • Rincez abondamment à l’eau claire et laissez sécher 48h minimum.

Inspirée de la technique ancestrale japonaise du

Les lames en bois composite nouvelle génération, comme celles de Fiberon ou Trex, imitent le veinage et la texture du bois naturel avec un réalisme bluffant. Leur avantage majeur : un entretien quasi nul (un simple nettoyage à l’eau savonneuse) et une couleur stable dans le temps. Attention cependant, elles ont tendance à chauffer davantage au soleil que le bois naturel et n’offrent pas la même sensation sous le pied.

Marion Bertrand

Architecte d'Intérieur & Passionnée de Rénovation
Ce qui l'anime : Mobilier sur mesure, Projets cuisine & bain, Solutions gain de place
Marion a grandi entourée d'artisans – son père était ébéniste et sa mère décoratrice. Cette immersion précoce lui a donné un regard unique sur l'aménagement intérieur. Aujourd'hui, elle partage son temps entre la conception de projets pour ses clients et l'écriture. Sa spécialité ? Transformer les contraintes en opportunités créatives. Chaque petit espace cache selon elle un potentiel insoupçonné. Les week-ends, elle restaure des meubles anciens dans son atelier niçois, toujours accompagnée de son chat Picasso.