Se faire entendre : les techniques pour ne plus être interrompu

Auteur Léa Bertrand
se faire entendre les techniques pour ne plus ytre interrompu

Ce sentiment universel et frustrant : vous êtes au milieu d’une phrase, en pleine réunion de travail, lors d’un dîner de famille ou dans une discussion entre amis, et soudain, votre élan est brisé. Quelqu’un vous coupe la parole, change de sujet, ou son regard vous signifie que votre propos s’est perdu dans le vide. Loin d’être un simple désagrément, cette expérience répétée peut saper la confiance en soi et transformer la communication en un véritable champ de mines.

Mais ce phénomène, loin d’être anecdotique, est le symptôme d’une crise plus profonde de l’attention. Dans une société saturée d’informations et de sollicitations numériques, la capacité d’écoute est devenue une ressource rare et précieuse. L’interruption n’est pas seulement une impolitesse ; elle révèle les dynamiques de pouvoir, les biais cognitifs et les nouvelles normes sociales qui régissent nos interactions.

La coach en développement personnel Mel Robbins, très suivie sur les réseaux sociaux, qualifie cette habitude de « irrespectueuse », la considérant non pas comme une marque d’engagement, mais comme un signal de désintérêt flagrant. Pour elle, c’est une indication claire qu’il est temps de poser des limites fermes pour défendre son espace d’expression.

Quand la parole vous est coupée : stratégies de reconquête

Être interrompu met à mal l’estime de soi, mais il existe des techniques pour reprendre le contrôle sans pour autant entrer en confrontation. La première, citée par Mel Robbins, est d’une simplicité désarmante : continuer à parler. En ne cédant pas immédiatement le terrain, vous signifiez que votre pensée mérite d’aller jusqu’à son terme. C’est un acte subtil d’affirmation.

Si l’interruption persiste, une autre tactique consiste à ralentir délibérément son débit. Parler plus lentement, presque de manière théâtrale, crée un effet de surprise qui a souvent pour conséquence de recapturer l’attention de l’auditoire. Cette modulation du rythme, sans élever la voix, est une manière élégante de reprendre la main.

Le coût de cette « non-écoute » n’est pas seulement émotionnel, il est aussi économique et organisationnel. Une étude de la Harvard Business School a démontré un lien direct entre le sentiment d’être écouté et la performance au travail. Hannah Collins, chercheuse associée à cette étude, note que « lorsque les employés sentent que leur voix compte, ils sont plus performants et plus motivés ». À l’inverse, des équipes où la parole est constamment coupée souffrent de malentendus, de décisions prises sur la base d’informations partielles et d’une baisse générale de l’engagement. Le temps perdu en réunions inefficaces et la correction d’erreurs dues à une mauvaise communication représentent des coûts cachés considérables pour les entreprises.

Dans les cas les plus récurrents, Mel Robbins conseille une approche directe : interpeller la personne par son nom et formuler clairement son besoin. Une phrase comme « Marc, j’aimerais juste finir ma pensée avant d’entendre ton avis » est une façon non agressive de poser une limite et de protéger son espace conversationnel.

Au-delà de la défense : l’art de captiver son auditoire

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Se défendre contre les interruptions est une chose, mais créer les conditions pour ne pas être interrompu en est une autre. Cela passe par une compréhension plus fine des mécanismes de l’écoute. Selon John Gray, psychologue et auteur cité par Harvard Health, le premier pas est d’observer les réactions. Un interlocuteur qui évite le contact visuel ou qui semble impatient n’est peut-être pas en attente de conseils, mais simplement d’une oreille attentive.

Beaucoup de gens partagent un problème pour évacuer le stress, non pour obtenir une solution clé en main. Tenter d’apporter une solution immédiate peut être perçu comme une forme de supériorité. Pour éviter cet écueil, John Gray suggère de poser des questions de permission : « Veux-tu savoir ce que j’en pense ? » ou « J’ai une perspective différente, est-ce que ça t’intéresse de l’entendre ? ». Ces questions transforment un potentiel monologue en un dialogue respectueux.

L’adaptation est la clé. Le psychologue Tony Alessandra, également cité par Harvard Health, recommande de synchroniser son style de communication avec celui de son interlocuteur. Certains sont plus réceptifs aux récits et aux émotions, d’autres préfèrent des messages directs, factuels et concis. Observer le rythme de parole de l’autre et ajuster le sien peut éviter que son esprit ne décroche. Parler trop vite à quelqu’un de posé peut le submerger ; parler trop lentement à quelqu’un de pressé peut l’impatienter.

Le grand malentendu : nous écoute-t-on vraiment ?

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Même en appliquant toutes ces stratégies, un décalage inquiétant persiste entre le sentiment d’être écouté et la réalité de l’attention. C’est la conclusion d’une autre étude fascinante de la Harvard Business School, menée par Hannah Collins et Alison Wood Brooks. Leurs expériences révèlent une vérité dérangeante sur la nature de nos conversations.

Les chiffres sont éloquents : dans près d’un quart des cas (24 %), les auditeurs ne prêtent en réalité aucune attention à leur interlocuteur, bien qu’ils en donnent l’apparence. Plus troublant encore, dans 31 % des cas, la perception de l’attention ne correspond pas entre l’orateur et l’auditeur. Nous sommes devenus des maîtres dans l’art de simuler l’écoute, utilisant des hochements de tête, des sourires et des « mm-hmm » pour masquer le fait que notre esprit est à des kilomètres.

Ce « théâtre de l’écoute » a des conséquences profondes. Il crée une illusion de communication et de compréhension mutuelle là où il n’y a qu’un vide. Pour combler ce fossé, les chercheuses recommandent d’intégrer des signaux de vérification verbale dans la conversation. Faire des pauses, poser des questions comme « Est-ce que ce que je dis est clair ? » ou « Qu’en penses-tu jusqu’à présent ? » force l’auditeur à se réengager activement dans l’échange. Revenir sur des points abordés précédemment est aussi un excellent moyen de tester et de renforcer l’attention de l’autre.

En fin de compte, apprendre à se faire entendre dans un monde distrait n’est pas seulement une quête d’affirmation personnelle. C’est une compétence essentielle pour naviguer dans la complexité professionnelle et maintenir des relations interpersonnelles saines. C’est aussi, et peut-être surtout, réapprendre à créer un espace où l’autre peut, et veut, véritablement écouter.

Léa Bertrand

Jardinière Passionnée & Cuisinière du Potager
Ses terrains de jeu : Potager bio, Culture en pots, Recettes du jardin
Léa a découvert sa vocation en cultivant son premier potager sur un balcon de 4m². Depuis, elle n'a cessé d'expérimenter et de partager ses découvertes. Issue d'une famille de maraîchers bretons, elle a modernisé les techniques traditionnelles pour les adapter à la vie urbaine. Sa plus grande fierté ? Réussir à faire pousser des tomates sur les toits de Lyon ! Quand elle n'a pas les mains dans la terre, elle concocte des recettes avec ses récoltes ou anime des ateliers de jardinage dans les écoles de son quartier.