Virer une souche d’arbuste : le guide complet pour ne pas s’épuiser
J’ai passé plus de trente ans les mains dans la terre, à planter des centaines d’arbres et d’arbustes, et bien sûr, à en retirer pas mal aussi. On a tous une bonne raison de se séparer d’un arbuste : il devient trop grand, il est malade, ou tout simplement, on a envie de changer le décor. Mais le vrai défi commence une fois qu’il est coupé. Reste la souche. Et ses racines. Et là, on ne peut pas faire l’autruche.
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Une souche qui traîne, ce n’est pas juste moche. C’est un obstacle pour vos futures plantations, et pire, ça peut devenir un vrai problème pour une allée, une terrasse ou des canalisations enterrées. Franchement, dans mon métier, j’ai tout vu. Des racines qui soulèvent le bitume comme si c’était du papier, et des souches qui repartent de plus belle après avoir été coupées. D’ailleurs, je me souviens d’une petite souche de rien du tout, un forsythia que je pensais expédier en 20 minutes… Ça m’a pris deux heures et une bonne suée. Une leçon d’humilité !

Mon but ici, c’est simple : vous partager les techniques qui marchent vraiment, celles que j’utilise sur mes chantiers. Des méthodes sûres, efficaces et qui respectent votre jardin. Oubliez les astuces miracles, pour enlever une souche, il faut de la méthode et un peu d’huile de coude.
La mécanique des racines : comprendre pour mieux agir
Avant de foncer tête baissée avec une pioche, il faut comprendre à qui on a affaire. Une racine, c’est un organe vivant programmé pour trouver de l’eau et des nutriments. C’est cette force tranquille qui la rend si redoutable.
Grosso modo, il y a deux types de systèmes racinaires. Le premier, c’est le système pivotant : une grosse racine principale qui plonge droit dans le sol, avec des plus petites qui partent sur les côtés. Pensez aux conifères ou aux chênes. C’est souvent plus simple à gérer. Une fois que vous avez coupé ce pivot, le plus gros du travail est fait.

Le second, et le plus pénible, c’est le système traçant. Là, les racines sont nombreuses, peu profondes et s’étalent partout, comme une toile d’araignée. Le laurier-palme ou le lilas sont des champions dans cette catégorie. C’est ce genre de racine qui va fissurer une terrasse ou s’inviter dans un drain. Leur force est lente mais implacable.
Attention ! Quand vous coupez l’arbuste, la souche et ses racines ne meurent pas forcément. Elles ont des réserves et peuvent lancer de nouvelles pousses (on appelle ça des rejets). Pour s’en débarrasser pour de bon, il faut soit tout arracher, soit la tuer sur place. C’est ce qu’on appelle la dévitalisation.
Les méthodes manuelles : quand on veut un résultat rapide
L’arrachage à la main, c’est la méthode la plus directe et la plus respectueuse de l’environnement. Pour des souches de petite à moyenne taille (jusqu’à 15 cm de diamètre), c’est souvent la solution idéale.

La préparation, une étape non négociable
La première règle d’or : ne jamais, JAMAIS, creuser à l’aveugle. On n’est jamais à l’abri d’une canalisation de gaz, d’un câble électrique ou d’une conduite d’eau. Avant le moindre coup de pelle, faites une Déclaration de projet de Travaux (DT). C’est une démarche en ligne, souvent gratuite pour les particuliers via le service « reseaux-et-canalisations.gouv.fr », et ça peut vous éviter une catastrophe. Frapper une conduite de gaz avec une pioche, croyez-moi, ce n’est pas une expérience à tenter.
Une fois cette vérification faite, dégagez bien la zone de travail. Mettez des gants épais, des lunettes de protection et des chaussures de sécurité. Une bêche qui glisse sur une racine et atterrit sur un pied, ça arrive plus vite qu’on ne le pense.
Technique 1 : L’arrachage à la force des bras
Le meilleur moment pour ça ? Après une bonne pluie (sol meuble) mais par temps sec (pour ne pas patauger dans la boue).

- Laissez de la hauteur : Ne coupez pas le tronc à ras. Laissez au moins 50-80 cm. Ce moignon sera votre meilleur ami pour faire levier plus tard. C’est l’erreur classique du débutant de tout scier trop court.
- Creusez une tranchée : Avec une bonne bêche (comptez entre 30€ et 50€ pour un modèle robuste), creusez un cercle à environ 40-50 cm autour de la souche pour exposer les racines principales.
- Dégagez et coupez les racines : Dégagez la terre autour des plus grosses racines. Pour les couper, le top du top, c’est la scie sabre avec une lame spéciale racines (un investissement autour de 100€ qui vous sauvera le dos). Sinon, une hachette bien affûtée fait l’affaire, mais gare aux ricochets sur les cailloux !
- Faites levier : Une fois les racines principales coupées, utilisez le tronc comme un joystick. Poussez, tirez, balancez… Vous entendrez les petites racines restantes craquer. Quel son satisfaisant ! Continuez jusqu’à ce que la souche se libère.
Comptez une bonne heure ou deux de sport. Pensez à bien plier les genoux pour protéger votre dos.

Technique 2 : L’aide d’un tire-fort
Pour les souches plus balèzes, le tire-fort est un allié de poids. C’est un treuil manuel qui démultiplie votre force. On peut en louer pour une journée, généralement entre 60€ et 90€ chez les grands loueurs (Kiloutou, Loxam…).
Le principe : on ancre le tire-fort à un point solide (un gros arbre, un poteau…) en protégeant bien le support avec une sangle large. On attache l’autre bout à la souche, le plus bas possible. Puis on tend le câble.
AVERTISSEMENT SÉCURITÉ : Un câble sous tension est une arme. S’il lâche, il fouette l’air avec une force incroyable. Ne restez JAMAIS dans l’axe du câble. Un petit conseil de pro : jetez une couverture lourde ou une vieille bâche sur le milieu du câble. S’il casse, ça amortira le coup de fouet. J’ai vu un câble traverser une portière de voiture une fois. On ne plaisante pas avec ça.

La dévitalisation : la solution pour les patients (ou les cas compliqués)
Parfois, arracher n’est pas une option : souche énorme, trop près d’un mur… Dans ce cas, on cherche à la faire mourir sur place. C’est plus long, mais moins physique.
- La méthode des trous au sel : Juste après avoir coupé l’arbuste, percez de gros trous verticaux (20 mm de diamètre, 15-20 cm de profondeur) dans la souche. Remplissez-les de gros sel de cuisine ou, encore mieux, de sel d’Epsom (sulfate de magnésium). Ajoutez un peu d’eau, puis bouchez les trous avec de l’argile ou de la cire. L’idée est que le sel soit absorbé et tue la souche de l’intérieur.
- L’astuce écolo de la bâche : C’est la technique zéro effort ! Couvrez la souche et une zone large autour avec une bâche noire bien opaque. Bloquez-la avec des pierres ou de la terre. Privée de lumière et d’air, la souche va s’épuiser à essayer de faire des rejets, puis pourrir lentement.
Mais alors, il se passe quoi après ? Soyez patient ! Avec ces méthodes, on parle de plusieurs mois, voire un an ou deux. La souche ne va pas disparaître par magie. Elle va se ramollir, devenir friable. Un jour, vous pourrez l’éclater en morceaux d’un simple coup de bêche.

Alors, on choisit quoi ? Budget, temps et énergie
Pour y voir plus clair, voici un petit résumé pour vous aider à choisir votre stratégie :
L’arrachage manuel est pour vous si la souche est petite, que vous êtes pressé et que vous n’avez pas peur de transpirer. Côté budget, c’est quasi gratuit si vous avez déjà les outils.
Le tire-fort est la solution pour les souches moyennes à grosses quand vous voulez un résultat le jour même. Le coût principal est la location de l’outil (autour de 70€), mais la sécurité doit être votre priorité absolue.
La dévitalisation (au sel ou à la bâche) est parfaite si vous n’êtes pas pressé, si la souche est inaccessible ou si vous voulez une solution douce. C’est l’option la plus économique (le prix d’un sac de sel ou d’une bâche), mais il faut accepter de voir la souche pendant de longs mois.

Et si tout ça vous décourage ? Faire appel à un paysagiste coûte généralement entre 150€ et 400€ selon la taille et l’emplacement de la souche. C’est un budget, mais c’est la garantie de la tranquillité.
Et après, on fait quoi de la souche ?
Une fois ce trophée extrait de votre jardin, plusieurs options s’offrent à vous. Vous pouvez la débiter en morceaux et l’emmener à la déchetterie (pensez à vérifier leurs conditions). Mais mon conseil, si vous avez la place, c’est de la laisser dans un coin reculé du jardin. En se décomposant, elle deviendra un refuge formidable pour la biodiversité (insectes, champignons…) et enrichira votre sol. Un recyclage 100% naturel !
Galerie d’inspiration


Le trou est béant, la terre est retournée… Ne vous précipitez pas pour replanter. Le sol a subi un traumatisme et a besoin d’être revitalisé pour accueillir une nouvelle vie.
- Nettoyez : Retirez les derniers débris de racines et les cailloux mis à jour.
- Aérez : Décompactez la terre au fond et sur les bords avec une grelinette pour favoriser le drainage et l’oxygénation.
- Enrichissez : Incorporez généreusement du compost bien mûr. Un ajout de corne broyée apportera de l’azote à libération lente, idéal pour la future reprise.
- Patientez : Laissez le sol se reposer quelques semaines avant de planter.

Le saviez-vous ? Une seule gousse d’ail, riche en composés soufrés, insérée dans des trous percés dans une souche peut initier sa décomposition.
Cette méthode de grand-mère, bien que très lente (plusieurs années), illustre une approche naturelle. En face, les dévitaliseurs du commerce, comme le Destructeur de Souches de Fertiligène à base de sulfate d’ammonium, accélèrent le processus en 6 à 12 mois en stimulant l’activité des champignons. Le choix se fait entre patience et écologie d’un côté, et efficacité contrôlée de l’autre.

Et si la meilleure solution était de ne rien faire ?
Si elle n’est pas mal placée, une souche peut devenir un atout charme. Poncé et traité avec une lasure marine, un tronc bas devient un tabouret rustique. Creusé, il se transforme en une jardinière unique pour des plantes grasses comme les sedums ou les joubarbes, qui demandent peu de terre. C’est aussi un support parfait pour poser un bain d’oiseaux ou une sculpture légère. Une façon poétique de conserver une trace de l’histoire du jardin.
L’option radicale : le rognage professionnel.
L’alternative ultime : la location d’une rogneuse de souche.
Pour les souches récalcitrantes ou multiples, louer cet engin (chez Loxam ou Kiloutou, par exemple) pour une demi-journée peut être un calcul judicieux. Moins cher qu’une intervention, cela demande un peu de prise en main mais garantit un résultat rapide et propre, grignotant le bois jusqu’à 20 cm sous le niveau du sol, sans laisser de trou béant.