Bicarbonate contre les souris : L’avis d’un pro, sans filtre et avec les vraies astuces

J’ai passé un paquet d’années dans le monde de la dératisation, et si on démarre ce métier en pensant qu’on va juste poser des pièges, on se rend vite compte que 90% du boulot, c’est de l’observation. On apprend à devenir une sorte de détective : reconnaître le petit grattement sec dans la cloison, sentir cette odeur d’urine si particulière, deviner le chemin qu’une souris va prendre le long d’une plinthe… Et surtout, on écoute les gens, leurs angoisses et toutes les solutions qu’ils ont déjà tentées, comme la fameuse astuce du bicarbonate de soude.

Alors, la grande question : est-ce que ça marche vraiment, ce remède de grand-mère ? La réponse est… oui, mais. C’est un « oui » avec beaucoup de conditions. Il faut comprendre comment ça fonctionne, pourquoi, et surtout, connaître les limites pour ne pas transformer un petit souci en gros problème. Mon but ici, c’est de vous donner mon retour de terrain, en toute franchise. On va voir comment utiliser le bicarbonate efficacement, mais je vous dirai aussi, sans détour, à quel moment il faut arrêter les frais et passer à la vitesse supérieure.

Avant tout : comprendre à qui vous avez affaire

Avant même de penser à préparer un appât, il faut cerner votre adversaire. Dans nos maisons, c’est quasiment toujours la souris domestique. C’est une petite bête hyper maligne, super bien adaptée à nos vies. Elle est curieuse, mais aussi incroyablement méfiante de tout ce qui est nouveau. C’est ce qu’on appelle la néophobie. Si vous bougez un pot de fleurs sur son passage habituel, elle va l’éviter pendant un moment.

Son corps est un passe-partout. Franchement, un trou de la taille d’une pièce de 10 centimes, ça lui suffit pour passer. Son squelette est d’une flexibilité étonnante. Pour qu’elle s’installe, il ne lui faut pas grand-chose : un coin chaud, un accès à de la nourriture et un peu de tranquillité pour son nid. Les premiers indices sont faciles à repérer : des grattements la nuit, quand tout est silencieux, et de petites crottes noires et pointues, qui ressemblent à des grains de riz un peu brûlés (3 à 6 mm de long). Si vous en voyez, le doute n’est plus permis.

Et puis, il y a l’odeur. Cette odeur âcre d’ammoniac qui vient de son urine, qu’elle dépose partout pour marquer son territoire. Si vous la sentez distinctement dans une pièce, c’est que l’infestation est déjà bien en place. Un détail crucial : les souris longent toujours les murs pour se sentir en sécurité. Elles ne traversent que très rarement une pièce en plein milieu. C’est l’info la plus importante pour savoir où placer vos pièges.

La mécanique du bicarbonate : comment ça marche (et pourquoi c’est un peu cruel)

Le bicarbonate de soude n’est pas un poison classique. Son action est purement chimique. Quand une souris en avale, il se mélange à l’acide de son estomac. Ça crée une réaction qui produit du dioxyde de carbone – le même gaz que dans l’eau pétillante.

Nous, les humains, on évacue ce gaz par un simple rot. Mais les rongeurs, eux, sont physiologiquement incapables de roter. Leur système digestif n’est pas fait pour ça. Le gaz s’accumule, la pression devient insupportable et ça entraîne une défaillance des organes internes. Il faut être honnête, la mort est lente et douloureuse pour l’animal.

Pour que ça marche, la souris doit manger une dose suffisante. C’est pour ça qu’on doit ruser en le mélangeant à un appât très gourmand. Elle ne mangera jamais du bicarbonate pur, ça n’a aucun intérêt pour elle.

Mes recettes d’appâts qui fonctionnent (et les dosages)

La réussite de l’opération, c’est 20% la recette, 80% le placement. Mais une bonne recette, ça aide !

Règle n°1 et non-négociable : portez des gants ! Les souris ont un flair incroyable. Si elles sentent votre odeur sur l’appât, elles n’y toucheront jamais. Des gants en latex ou nitrile sont parfaits. C’est aussi une protection pour vous.

Recette 1 : Le Classique (Farine, Sucre, Bicarbonate)

Simple et efficace, car il combine énergie lente et rapide. Un vrai festin pour elles.

• Ingrédients : 1 part de farine, 1 part de sucre en poudre, 1 part de bicarbonate. Par exemple, une cuillère à soupe de chaque.
• Préparation : Dans un bol bien sec, mélangez parfaitement la farine et le sucre. Ensuite seulement, ajoutez le bicarbonate et re-mélangez jusqu’à ce qu’il soit totalement invisible.
• Présentation : Déposez des petits tas de la taille d’une pièce de 2 euros dans des couvercles de bouteilles ou sur des bouts de carton.

Recette 2 : L’Irrésistible (Beurre de cacahuète)

Honnêtement, c’est ma préférée. L’odeur et le gras du beurre de cacahuète, c’est presque un aimant à souris. Prenez le premier prix, bien gras et sucré.

• Ingrédients : 2 parts de beurre de cacahuète, 1 part de bicarbonate.
• Préparation : Malaxez bien les deux jusqu’à obtenir une pâte homogène. La texture collante empêche la souris de trier.
• Présentation : Formez des petites boulettes de la taille d’un pois chiche et déposez-les directement sur leur passage.

Recette 3 : La Gourmande (Chocolat en poudre)

L’odeur du chocolat, ça marche aussi très bien. La poudre sucrée pour le petit-déjeuner est parfaite pour ça.

• Ingrédients : 1 part de chocolat en poudre, 1 part de bicarbonate.
• Préparation : Mélangez bien les poudres à sec. L’odeur forte du cacao masquera bien celle du bicarbonate.
• Présentation : En petits tas, ou en ajoutant quelques gouttes d’eau pour former une pâte.

Le placement stratégique : 80% du succès

Vous pourriez avoir le meilleur appât du monde, s’il n’est pas au bon endroit, il prendra la poussière. Pensez comme une souris :

• Longez les murs : C’est la base. Placez vos appâts le long des plinthes, derrière les meubles, au fond des placards.
• Cherchez les points chauds : Derrière le frigo (ça chauffe !), sous l’évier (humidité), près de la poubelle (nourriture)…
• Pensez en 3D : Les souris sont d’excellentes grimpeuses. Pensez aux combles, aux faux-plafonds. J’ai déjà résolu des cas en posant un appât sur le haut d’une armoire de cuisine.
• Sécurisez : Si vous avez des enfants ou des animaux, soyez hyper vigilant. Placez les appâts dans des endroits vraiment inaccessibles pour eux. Derrière un meuble lourd collé au mur, par exemple.
• Soyez patient : À cause de leur méfiance, elles peuvent ignorer les appâts pendant 2 ou 3 jours. Ne baissez pas les bras. Si après 4 jours rien n’a bougé, changez d’endroit.
• Vérifiez tous les jours : Si un appât a été mangé, remplacez-le. C’est que vous tenez un bon spot !

Les limites du bicarbonate : parlons franchement

Le bicarbonate, c’est bien pour une ou deux souris égarées. Si vous avez une infestation installée (une famille, des nids…), vous n’y arriverez pas. C’est comme essayer de vider l’océan avec une petite cuillère.

Le plus gros inconvénient : le cadavre. Et ça, personne n’en parle. La souris va mourir là où elle se sent en sécurité : dans une cloison, sous le plancher… Et l’odeur d’un rongeur en décomposition, je peux vous garantir que c’est une expérience que vous ne voulez pas vivre. Ça peut empester pendant des semaines et parfois, la seule solution est de casser le mur. Un coût et des ennuis bien pires que le problème de départ !

Bon à savoir : Si vous trouvez le cadavre, la procédure est simple mais obligatoire. Mettez des gants, placez la souris dans un double sac-poubelle bien fermé et jetez-le dans votre poubelle extérieure. Lavez-vous bien les mains après.

Alors, on choisit quoi ? Comparons les options

Plutôt que de faire un tableau, parlons des avantages et inconvénients des solutions courantes.

• Le Bicarbonate : Pas cher du tout (moins de 5€), mais son efficacité est limitée aux très petites infestations. Le gros point noir, c’est le risque d’odeur si le cadavre est inaccessible et le côté peu éthique de la mort lente.
• La Tapette classique : Très économique (2-3€ la tapette) et provoque une mort instantanée si elle est bien placée. Le hic, c’est qu’il faut la manipuler et voir l’animal. Certaines souris apprennent aussi à les éviter.
• Le Piège à capture vivante : La solution la plus éthique. Coût modéré (autour de 10-15€). Le problème, c’est qu’il faut ensuite relâcher la souris loin de chez vous (vraiment loin, plusieurs kilomètres !) et vérifier le piège tous les jours pour ne pas la laisser mourir de stress.
• Faire appel à un pro : C’est un budget, oui. Comptez entre 120€ et 300€ pour une intervention complète. Mais l’expert va identifier TOUS les points d’entrée, utiliser des produits sécurisés et, surtout, vous proposer un plan pour que ça n’arrive plus. C’est un investissement pour la tranquillité.

La VRAIE solution durable : la prévention

Tuer les souris, c’est bien. Les empêcher d’entrer, c’est mieux. C’est là que tout se joue.

1. Le calfeutrage : votre mission prioritaire

C’est LE travail le plus important. Une inspection minutieuse de votre maison s’impose.

Petit tuto express pour boucher un trou :

1. Nettoyez bien la zone autour du trou.
2. Bourrez le trou avec de la laine d’acier grade 000 (attention, pas la paille de fer savonneuse pour les casseroles, elle rouille !). Les souris détestent la ronger. Vous en trouverez pour environ 5€ en magasin de bricolage.
3. Recouvrez le tout avec du mastic acrylique ou du ciment prompt (un tube de mastic coûte autour de 7€).
4. Lissez bien et laissez sécher. C’est fait !

Comptez une bonne heure pour inspecter et boucher les trous évidents d’une cuisine. Cherchez autour des tuyaux d’évier, du chauffage, des câbles électriques…

2. L’hygiène : coupez-leur les vivres

Pas de nourriture, pas d’invités. C’est aussi simple que ça.

• Aliments : Tout doit être dans des boîtes hermétiques en verre ou en métal. J’ai vu des souris dévorer des paquets de pâtes à travers du plastique fin.
• Poubelles : Sortez-les tous les soirs et utilisez une poubelle avec un couvercle qui ferme bien.
• Propreté : Un coup d’aspirateur régulier, pas de miettes sur le plan de travail et pas de vaisselle qui traîne la nuit.

Petit défi pour vous : Cette semaine, je vous mets au défi de trouver et de boucher UN seul trou d’entrée potentiel chez vous. Le grand classique, c’est autour du tuyau d’évacuation de l’évier. Allez-y, vous serez surpris de ce que vous trouverez !

Quand appeler un professionnel ?

Savoir quand on est dépassé, c’est essentiel. Si vous voyez un de ces signes, n’attendez pas :

• Vous voyez des souris en pleine journée. (Signe de surpopulation)
• Vous trouvez des crottes un peu partout, dans plusieurs pièces.
• Les dégâts sont importants : câbles rongés (danger d’incendie !), emballages éventrés.

En résumé, le bicarbonate peut dépanner pour un cas isolé. Mais la seule stratégie gagnante sur le long terme, c’est une maison bien scellée et une hygiène impeccable. C’est bien plus efficace que n’importe quel poison ou remède maison.

Galerie d’inspiration

Une souris peut se faufiler dans une ouverture de seulement 6 millimètres, soit le diamètre d’un stylo bille.

Ce chiffre donne le vertige et change notre façon de voir nos maisons. Chaque passage de câble, chaque tuyauterie sous l’évier, chaque interstice sous une porte de garage devient une autoroute potentielle. Le calfeutrage devient votre meilleur allié préventif. Inspectez minutieusement les fondations et les points d’entrée. Pour les fissures, utilisez un mastic anti-rongeurs spécifique, et pour les trous plus importants, bourrez-les de laine d’acier de grade #000 ou #0000. Contrairement aux mousses expansives classiques, les souris ne peuvent pas la ronger.

Alors, faut-il plutôt les tuer ou les repousser ?

La réponse dépend de votre objectif. L’appât au bicarbonate est une solution létale : il vise à éliminer une colonie déjà installée. Le mélange est ingéré et agit de l’intérieur. À l’inverse, les solutions comme l’huile essentielle de menthe poivrée sont des répulsifs. Elles agissent sur leur odorat surdéveloppé pour rendre une zone (un placard, un tiroir) inhospitalière et les décourager d’y nicher. L’un est curatif, l’autre est préventif. On peut donc combiner les deux : des appâts dans les zones de passage cachées, et quelques gouttes de répulsif dans les zones de vie pour créer une barrière olfactive.