J’ai passé plus de vingt ans les mains dans la terre, en tant que paysagiste. J’ai vu des centaines de jardins, des plus simples aux plus spectaculaires. Et partout, c’est la même rengaine : « On fait quoi de cette vieille souche ? ». La plupart des gens veulent juste s’en débarrasser. Mais franchement, faire venir un pro pour l’arracher, ça peut vite chiffrer entre 300€ et plus de 800€ selon la taille et l’accès. Ouch.
Moi, je vois les choses différemment. Une souche, ce n’est pas un problème. C’est une opportunité en or de créer quelque chose d’unique, avec une âme.
Au fil des années, j’ai transformé des dizaines de ces « problèmes » en véritables atouts. Des jardinières débordant de fleurs, des petits bancs rustiques, des supports pour d’autres plantes… Ce n’est pas juste de la déco. C’est une manière de boucler la boucle, de respecter la vie de l’arbre jusqu’au bout. Alors, je vais vous partager mes techniques, celles que je montre à mes apprentis. Pas de blabla, que du concret, des méthodes qui marchent et des astuces tirées du terrain.
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Avant de se lancer : Bien inspecter sa souche
Avant même de penser à vos outils, prenez cinq minutes pour observer. Chaque souche a son propre caractère. Son état va décider de la réussite, ou non, de votre projet. C’est l’étape la plus importante, ne la zappez pas.
De quel bois elle se chauffe ?
La nature du bois, c’est le point de départ. Un bois dur comme le chêne ou le châtaignier est dense, plein de tanins, et donc très résistant à la pourriture. C’est le top pour un projet qui doit durer, comme un tabouret. Mais attention ! C’est aussi un vrai défi physique à creuser. Pour vous donner une idée, une souche de chêne de 50 cm de diamètre peut facilement vous prendre une journée entière de travail juste pour la préparer. Attendez-vous à transpirer.
À l’inverse, les résineux comme le pin ou le sapin sont beaucoup plus tendres. Ils se travaillent comme du beurre, c’est parfait pour se faire la main avec une première jardinière. Bon à savoir : qui dit bois tendre dit aussi décomposition plus rapide. Une jardinière en pin tiendra entre 5 et 8 ans, alors qu’une en chêne peut dépasser les 15 ans. Les bois comme le peuplier ou le bouleau ? Je les déconseille pour une jardinière, car ils pourrissent très vite au contact de l’humidité, à moins d’accepter son côté très éphémère.
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Un petit check-up s’impose
Approchez-vous et jouez au détective. Le bois est-il sain ? Si vous voyez plein de petites galeries fines, méfiance, des termites ou des capricornes sont peut-être passés par là. Si le bois part en poussière quand vous le grattez, il est probablement trop abîmé.
Et les champignons ? Certains, comme ces grosses « consoles » sur le côté de la souche (les polypores), indiquent que la décomposition est déjà bien avancée à l’intérieur. Ça peut faciliter le creusage, mais ça fragilise la structure. Le vrai drapeau rouge, c’est la mérule ou l’armillaire (un champignon qui fait des filaments noirs). Ces derniers peuvent contaminer d’autres arbres, voire les boiseries de votre maison. J’ai un souvenir cuisant d’un client qui a insisté pour garder une souche malade… Un an plus tard, on traitait deux arbres voisins qui commençaient à dépérir. Dans le doute, mieux vaut tout enlever.
Stabilité et emplacement : les clés du succès
Poussez fort sur la souche. Vraiment fort. Si elle bouge, même un peu, c’est que ses racines sont pourries. Le projet s’arrête là. Une souche instable est un danger, surtout si vous imaginez un siège pour les enfants. On ne décore pas un truc qui risque de basculer.
L’emplacement aussi est crucial. En plein milieu du passage, c’est la chute assurée. Collée à un mur, elle va garder l’humidité et pourrait causer des dégâts. Pensez aussi au soleil ! Une souche en plein cagnard sera parfaite pour des plantes grasses, alors qu’un coin à l’ombre accueillera à merveille des fougères ou de la mousse.
Le projet phare : transformer la souche en jardinière
C’est le grand classique, et pour une bonne raison : c’est magnifique. Une souche qui refleurit, ça a un charme fou. Voici ma méthode, étape par étape, pour un résultat au top et sans se blesser.
Les bons outils pour bien travailler (et un budget)
Pas la peine de sortir l’artillerie lourde tout de suite. La sécurité avant tout ! Mettez TOUJOURS des lunettes de protection, des gants épais et des chaussures fermées.
Pour démarrer, voici une petite liste de courses qui ne vous ruinera pas :
Une perceuse-visseuse qui a un peu de pêche. Au fait, votre petite visseuse premier prix risque de souffrir. Idéalement, visez un modèle filaire d’au moins 750W ou une sans-fil 18V avec une batterie bien chargée.
Une grosse mèche à bois plate ou une mèche hélicoïdale (20-25 mm de diamètre). Comptez environ 15€ chez Castorama ou Leroy Merlin.
Un ciseau à bois large et costaud (3-4 cm) et un maillet. Prévoyez dans les 20-30€.
Un sac de bon terreau (environ 8€) et un peu de billes d’argile ou de gravier pour le drainage.
Pour les plus aguerris, la meuleuse d’angle avec un disque à sculpter est très efficace mais agressive. Quant à la tronçonneuse… Attention ! Je le dis et le répète : n’utilisez une tronçonneuse pour creuser que si vous êtes un pro formé. Le risque de rebond est énorme. Un de mes jeunes apprentis a eu un jour un vilain retour de chaîne en voulant aller trop vite sur une souche de frêne. Heureusement, son pantalon anti-coupure lui a probablement sauvé la jambe.
Le creusement, pas à pas
Dessinez votre contour : Sur le dessus de la souche, tracez un cercle. Gardez une paroi d’au moins 8 à 10 cm d’épaisseur. Si c’est trop fin, ça va pourrir en un rien de temps.
Percez, percez, percez : C’est le secret pour ne pas s’épuiser ! Avec votre plus grosse mèche, faites une multitude de trous verticaux à l’intérieur du cercle. Allez le plus profond possible. Plus les trous sont serrés, plus la suite sera facile.
Évidez le cœur : Prenez le ciseau à bois et le maillet. Placez le biseau du ciseau vers le centre et tapez pour faire sauter les cloisons entre les trous. Le bois partira par gros copeaux. C’est bien plus contrôlé qu’à la hache. Visez une profondeur de 15 à 20 cm pour que les plantes aient de la place.
LE DRAINAGE (non négociable) : Sans ça, l’eau va stagner et tout pourrira. Percez au moins trois trous depuis le fond de votre bol, en les inclinant vers le bas et vers l’extérieur pour que l’eau s’évacue bien.
Protéger le bois (optionnel) : Pour gagner quelques années, vous pouvez tapisser l’intérieur avec un feutre géotextile. Ça empêche la terre de boucher le drainage et de coller au bois. Astuce peu connue : vous pouvez aussi brûler légèrement la surface intérieure avec un petit chalumeau. Cette couche de carbone protège naturellement le bois.
Et les copeaux de bois ? Surtout, ne les jetez pas ! Ils feront un excellent paillis au pied de vos arbustes.
Le choix des plantes
Le contenant est prêt, il faut le remplir. Oubliez la terre du jardin, souvent trop lourde. Préparez un mélange maison : un tiers de bon terreau, un tiers de compost, et un tiers de sable grossier ou de perlite pour le drainage. C’est la recette du succès !
Plein soleil : C’est le paradis des plantes grasses ! Sedums, joubarbes (sempervivums)… Elles adorent ça. Le thym rampant est aussi une super option.
Mi-ombre : Pensez aux heuchères pour leurs feuillages colorés, aux petits hostas ou aux fougères délicates.
Ombre humide : Le lierre à petites feuilles, la pervenche, ou tout simplement de la mousse que vous aurez prélevée dans un coin du jardin. Effet garanti !
SOS Bricolage : Les pépins courants et leurs solutions
Même avec les meilleurs conseils, on peut rencontrer un os. Pas de panique !
« Ma mèche fume et n’avance plus ! » C’est typique d’un bois très dur comme le chêne, ou d’une mèche qui n’est plus assez affûtée. Solution : ralentissez la vitesse de perçage, faites des pauses pour laisser le bois refroidir, ou investissez dans une mèche de meilleure qualité. Parfois, il faut juste être patient.
« Au secours, j’ai fendu la paroi de ma jardinière ! » Ça arrive, c’est du bois, pas du béton ! Si la fissure est petite, consolidez-la discrètement avec une ou deux longues vis en inox. Si elle est plus large, vous pouvez même visser une petite plaque de métal par-dessus. Ça ajoute un côté rustique/industriel et ça sauve votre travail.
D’autres idées, de la plus simple à la plus ambitieuse
Une jardinière, c’est super, mais il y a d’autres options.
D’ailleurs, si vous êtes intimidé par le creusement, voici l’option zéro effort : brossez simplement le dessus de la souche pour qu’il soit propre et plat, et posez dessus un joli pot en terre cuite. C’est simple, rapide, et ça fait tout de suite son effet.
Un coin pour s’asseoir ou une table basse
Une souche large et basse peut devenir un tabouret original. Pour ça, la surface doit être parfaitement plane et poncée (commencez au grain 80, finissez au 180). Pour la protection, j’utilise un saturateur pour bois extérieur. La différence avec une lasure ? Le saturateur pénètre et nourrit le bois en profondeur, il ne créera jamais un film qui finit par peler. C’est beaucoup plus durable.
Accepter le travail du temps
Un projet sur une souche, c’est un projet vivant. Il va évoluer, se patiner, et c’est ce qui fait sa beauté. Votre jardinière n’est pas éternelle. Chaque printemps, jetez un œil, ajoutez un peu de compost, vérifiez le drainage.
Et un jour, dans 5, 10 ou 20 ans, la souche finira par rendre les armes et s’effriter. Ce ne sera pas un échec. Ce sera la fin magnifique de son cycle. Vous pourrez alors démanteler ce qui reste avec une simple bêche, et ce bois décomposé deviendra un excellent amendement pour votre jardin. La boucle sera bouclée, et vous aurez profité pendant des années d’un élément unique, créé de vos propres mains.
Galerie d’inspiration
Le choix des végétaux est la touche finale qui donnera vie à votre souche. Adaptez votre sélection à l’ensoleillement pour créer un tableau durable et harmonieux.
Plein soleil : Jouez avec les textures des Sedums, des Joubarbes (Sempervivum) et du Thym serpolet qui retombera gracieusement.
Mi-ombre : Optez pour le feuillage coloré des Heuchères, la délicatesse des Tiarellas ou la fraîcheur des petites Fougères comme l’Asplenium.
Saviez-vous que les
Point crucial : Le drainage. Une souche creusée mais non percée se transforme en piège mortel pour les racines, qui pourrissent au premier excès d’eau. Avant de remplir de terreau, utilisez une perceuse avec une longue mèche à bois (20 mm de diamètre est idéal) pour créer au moins 3 ou 4 trous verticaux qui traversent le fond de la souche. L’eau doit pouvoir s’évacuer librement dans le sol.
Et si votre souche devenait un refuge pour l’imaginaire ?
Plutôt qu’une jardinière, transformez-la en maison de fée ! C’est un projet simple et magique à faire avec des enfants. Il suffit de fixer une petite porte en bois (trouvable en magasin de loisirs créatifs), d’ajouter un toit avec des morceaux d’écorce ou des lauzes, et de tapisser les abords de mousse fraîche. Un détail qui change tout et invite au rêve au cœur du jardin.
Saturateur bois : Il nourrit le bois en profondeur sans créer de film, conservant ainsi l’aspect mat et naturel de la souche. Idéal pour un look authentique. Pensez aux produits à base d’huiles naturelles comme ceux de la marque Blanchon.
Lasure haute protection : Elle forme une barrière plus épaisse contre l’eau et les UV. Parfaite pour les souches très exposées, mais demande un ponçage lors de la rénovation. La gamme V33 Climat Extrême est une référence.
Jardinière Passionnée & Cuisinière du Potager Ses terrains de jeu : Potager bio, Culture en pots, Recettes du jardin
Léa a découvert sa vocation en cultivant son premier potager sur un balcon de 4m². Depuis, elle n'a cessé d'expérimenter et de partager ses découvertes. Issue d'une famille de maraîchers bretons, elle a modernisé les techniques traditionnelles pour les adapter à la vie urbaine. Sa plus grande fierté ? Réussir à faire pousser des tomates sur les toits de Lyon ! Quand elle n'a pas les mains dans la terre, elle concocte des recettes avec ses récoltes ou anime des ateliers de jardinage dans les écoles de son quartier.